Photo de la semaine: ignoble trafic de jeunes filles réfugiées burundaises dans les camps en Tanzanie

Photo de la semaine: ignoble trafic de jeunes filles réfugiées burundaises dans les camps en Tanzanie

Il se remarque un phénomène de « trafic de jeunes filles » dans les camps de réfugiés burundais en Tanzanie. Les plus visées sont des moins de 18 ans. Elles partent généralement vers les villes de Mwanza, Arusha et Dar-es-Salaam. La police serait impliquée, en attestent des enquêtes qui n’aboutissent jamais. SOS Médias Burundi a recueilli des témoignages accablants. (SOS Médias Burundi)

Chantal*, nom d’emprunt. C’est une jeune fille qui va bientôt fêter son 17ème anniversaire. Elle vit dans la zone 5 (le village et le numéro de la maison sont omis pour question de sécurité). C’est dans le camp de réfugiés burundais de Nduta.

« Quand je suis partie, j’allais avoir 15 ans, j’y suis restée un an et demi. On m’avait promis un travail rémunéré et j’ai dû abandonner l’école. Mes parents ne savaient pas où j’étais », raconte-t-elle sous anonymat. Elle se rappelle où elle était allée. « A Mwanza », répond-t-elle.

Esclave sexuelle

Elle dit avoir été déçue quand elle a trouvé que le travail promis n’était pas celui qu’elle a été contrainte d’accomplir.

« Je devais être femme de ménage pour garder des enfants. Mais fort curieusement j’ai été exploitée sexuellement. J’étais obligée de coucher avec trois ou quatre hommes par jour. Une dame qui m’a accueillie et qui me logeait me donnait entre 3 et 4 mille shillings tanzaniens (presqu’1,5 USD) pour acheter des serviettes hygiéniques alors qu’à ma connaissance, un seul homme pouvait payer entre 20 et 30 mille shillings tanzaniens (entre 8 et 12 USD) et même plus, quand il s’estime satisfait du service», témoigne la jeune mineure, les larmes aux yeux.

Trafic organisé

Ce trafic qui aurait déjà touché une centaine de jeunes filles dans les camps de Nduta et Nyarugusu est bien organisé. Une source fiable précise qu’un réseau de femmes burundaises travaille avec un autre groupe de Tanzaniennes.

« Ce groupe de femmes dans les camps est chargé du repérage et de la sélection des jeunes filles qu’elles jugent belles, de taille moyenne. Le groupe les amadoue pour leur promettre un travail rémunéré à faire. Le tout se fait en clandestinité et elles sont sorties des camps sans même aviser leurs parents. Le groupe interne dans les camps paie ensuite les tickets et ces jeunes filles sont acheminées vers les centres urbains », indique un leader communautaire qui a essayé de dénoncer ce trafic , sans succès.

Villes de destination

Les villes de destination sont pour la plupart Mwanza située sur les bords sud du lac Victoria au nord du pays, Arusha au nord-est de la Tanzanie et à Dar-es-Salaam , la capitale économique du pays.

« Ces filles sont accueillies par un autre groupe de femmes tanzaniennes qui loue des maisons pour utiliser ces mineurs dans la débauche. Ces femmes cherchent alors des hommes qui couchent avec ces Burundaises moyennant des paiements d’argent », poursuivent nos sources.

« Moi je vivais avec cinq autres burundaises. Je ne savais pas d’où elles sont venues. C’est par après qu’on a su que nous sommes toutes des réfugiées burundaises tirées des camps de réfugiés », fait savoir Chantal* qui est par la suite revenue « à la raison », comme elle le dit.

Quand Chantal* a disparu du camp de Nduta, sa famille l’avait cherchée partout. Elle a fini par saisir la police qui , à son tour a mené des enquêtes sans succès. Au retour de la jeune, sa famille est allée informer la police et donner toutes les informations y relatives.

La police complice?

La réaction de la police a été surprenante, selon cette famille.

« Elle nous a juste conseillé d’aller demander une assistance psychologique et faire des tests médicaux pour l’enfant afin qu’elle soit protégée des infections ou d’autres maladies qu’elle aurait attrapées durant la sale besogne. Pas de mot sur les enquêtes ou sur la dénonciation des personnes indexées. Donc, cela prouve son implication », laissent entendre les parentés de Chantal*.

La thèse n’est pas à rejeter, selon des chefs locaux.

« Nous avons essayé de suivre le mouvement et dénoncer des personnes apparemment impliquées dans ce réseau. La police, mène parfois des enquêtes mais elle est bloquée à un certain stade. Ce réseau soudoie les policiers qui essayent de suivre le dossier. Et puis, c’est nous qui avons par la suite été intimidés et nous avons eu peur de continuer », témoigne un ancien chef de village à Nduta.

Conséquences

Le calvaire qu’endurent ces filles victimes du « trafic humain dans les camps » est indescriptible.

« Diverses maladies dont le VIH/Sida, des infections vaginales, des grossesses non désirées, tortures sexuelles, la mort, des intimidations,… », une longue et pénible énumération de *Chatal.

Elle dit avoir été assistée par un pasteur d’une église protestante de Mwanza qui lui a payé le ticket pour retourner au camp.

« J’ai été tirée de l’enfer. Mais il y a des filles qui finissent par s’y accommoder car elles ont à manger, à boire et quelques shillings pour les produits de beauté alors qu’ici au camp elles n’ont rien », raconte-t-elle, avant de dénoncer ce trafic et d’indiquer que ces filles ont besoin d’être secourues.

« Je pourrais témoigner devant les instances habilitées, mais je crains pour ma sécurité », conclut-elle, angoissée.

Le nombre de victimes de ce trafic humain est difficile à connaître, mais des sources dans les camps estiment qu’elles seraient une centaine, précisant que ce mouvement a débuté clandestinement il y a plus de deux ans.

La Tanzanie abrite plus de 126.600 réfugiés burundais.

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