Rwanda : le camp de Mahama se vide de plus en plus

Rwanda : le camp de Mahama se vide de plus en plus

Plus de 23 mille réfugiés burundais ont pris le chemin retour en provenance du Rwanda voisin en huit mois. Ils étaient essentiellement installés dans le camp de Mahama à l’est. (SOS Médias Burundi)

En avril 2020, le Rwanda hébergeait plus de 73.700 Burundais. Plus de 90% d’entre eux vivait au camp de Mahama. En avril 2021, soit une année après, le pays compte plus de 53 mille réfugiés burundais sur son sol.

Le rapatriement massif et officiel a été inauguré en août dernier. Plus de 23 mille Burundais ont depuis regagné leur pays. Mahama abrite désormais
42 mille Burundais.

Les raisons du retour au pays natal sont variées. Certains disent être séduits par le retour de la paix dans leur pays. “Je me dis que je serai en sécurité, à entendre les discours du président Ndayishimiye. Mes parents vivent aisément à Kirundo (nord du Burundi) et ce sont eux qui me supplient tous les jours de rentrer”, a indiqué un Burundais qui rentrait jeudi dernier après plus de cinq ans d’exil. “Je demande aux autorités burundaises de veiller sur notre sécurité. Cela va motiver les autres qui ont toujours peur de rentrer”, a affirmé un rapatrié sur une rangée à la frontière burundo-rwandaise de Gasenyi-Nemba (nord du Burundi).

Des réfugiés qui décident de rentrer disent qu’ils ont peur de mourir de faim en exil. La ration alimentaire a été réduite de 60%. “Aujourd’hui, une personne reçoit une somme de 3040 Frw par mois (plus ou moins 3$). Comment ne pas rentrer alors que cette ration alimentaire a été réduite de 60%. C’est en fait un message clair qui nous a été donné”, a murmuré une Burundaise qui rentrait avec ses deux enfants.

Des Burundais vivant en milieu urbain quant à eux evoquent la cherté de la vie. “Je vivais à Kigali et me débrouillais pour vivre tant bien que mal : servir dans des bistrots, travailler comme chauffeur ou dans un chantier de construction. Avec la pandémie du Covid-19, tout a été gâché. Comment ne pas rentrer s’il y a la sécurité ?” a réagi un autre jeune burundais qui s’apprêtait à passer la frontière rwandaise, pour être embarqué dans un des bus du HCR-Burundi.

L’ agence onusienne pour les réfugiés reconnaît que la réduction de la ration alimentaire peut pousser des gens à rentrer. « Cette réduction reste un facteur important dans la prise de telles décisions. Mais j’ose espérer que leur souhait est essentiellement guidé par le souci de sécurité”, a tenu à expliquer aux médias, Filippo Grandi, le haut commissaire des Nations-Unies pour les réfugiés.

Les prévisions du HCR tablent sur le retour de 40 mille réfugiés durant cette année. “Cela signifie qu’il ne restera que dix à quinze milles réfugiés au Rwanda. Essentiellement des jeunes qui ont réellement manifesté en 2015, de vrais opposants du régime, des activistes de la société civile, des hommes des médias, des avocats et des anciens membres des forces de sécurité et de l’ordre”, tente d’expliquer un activiste burundais. “Ce qui n’est pas mauvais car celui qui ne s’accuse de rien, celui qui a fui guidé par la peur ou celui qui a suivi le mouvement tout simplement doit rentrer”, souligne cet observateur avisé.

Kigali est parmi les mauvais élèves de ce “rapatriement volontaire”. La capitale rwandaise n’a vu que moins d’un millier de départs. Elle héberge actuellement 10.125 Burundais alors qu’en juin dernier, ils étaient un peu plus de 11 mille. “C’est normal car les ennemis supposés ou jurés de Gitega vivent à Kigali”, commente un journaliste burundais, lui aussi réfugié.

Quid de la fermeture du camp.

“Une fois les réfugiés partis, on peut soit consolider soit fermer, c’est clair”, a indiqué le patron du HCR au niveau mondial, Filippo Grandi. Le ministère en charge des réfugiés au Rwanda a pour sa part commencé à installer des réfugiés congolais (Banyamulenge) au camp de Mahama. Ils sont accueillis dans des anciennes habitations des Burundais qui rentrent.

Kigali tranquillise tout de même les réfugiés qui ne se sont pas encore décidés de rentrer. Ils continueront de bénéficier de la protection sur le sol rwandais. “Nos frontières restent par ailleurs ouvertes pour l’un ou l’autre qui fuit vers nous”, a tenu à préciser Olivier Kayumba, secrétaire permanent au ministère de la gestion des catastrophes, en charge des réfugiés au Rwanda.

Pendant ce temps, Gitega rassure que “les rapatriés ne seront pas inquiétés” et demande à ceux qui hésitent encore de “rompre avec la peur et de rentrer pour aider les autres compatriotes à developper leur patrie”.

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Photo : le patron du HCR s’entretient avec un petit garçon à la frontière de Gasenyi-Nemba qui rentre avec sa mère, le 29 avril 2021

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