Buganda-Rugomba : ces cadavres vomis par la Rusizi qui font bouger la présidence

Buganda-Rugomba : ces cadavres vomis par la Rusizi qui font bouger la présidence

Entre le 14 et le 17 octobre seulement, au moins 14 corps ont été retrouvés dans les communes de Buganda et Rugombo, province de Cibitoke (nord-ouest du Burundi). Seuls deux corps de femmes figurant dans un groupe de cadavres découverts ce dimanche sont rapportés, le reste étant des hommes. Une commission du bureau de la présidence s’est rendue à Cibitoke ce lundi pour s’enquérir de la situation. La majorité de victimes sont décapitées ou amputées de jambes. (SOS Médias Burundi)

La récente découverte a eu lieu dimanche dernier. Cinq cadavres ont été aperçus à la transversale 5 au pied de la colline de Nyamitanga en commune de Buganda. C’est à la frontière avec la colline de Kagwema de la commune de Gihanga en province de Bubanza (ouest).

La veille, deux autres corps avaient été découverts à la transversale 2 Kaburantwa (même commune de Buganda).

Selon nos informations, deux autres corps ont été vus à la transversale 3 Gasenyi vendredi dernier au moment où trois autres ont été découverts le 14 octobre sur la transversale 6 de la colline de Ndava-Village, toujours sur la commune de Buganda. Les deux qui restent ont été retrouvés sur la transversale 11 dans la localité de Rusiga. C’est en commune frontalière de Rugombo.

La majorité de cadavres ont été vomis par la rivière Rusizi qui sépare le Burundi et la RDC. « La plupart était emballée dans des bâches ou grands sacs. On a retrouvé sur la majorité de corps une tenue de sport », disent des témoins. Et d’ajouter « Les victimes étaient décapitées ou amputées de jambes ».

Inquiétude des autorités locales

D’après nos informations, les autorités locales et provinciales ont alerté leur hiérarchie sur une situation « très inquiétante qui les dépasse ».

Une équipe du bureau de l’office du chef de l’Etat s’est rendue à Cibitoke pour rencontrer Carême Bizoza, le gouverneur de Cibitoke ainsi que le commissaire communal de Buganda et l’administrateur communal de la même entité. « Le chef de la délégation a proposé que le parquet ouvre des dossiers en rapport avec ces découvertes macabres et de ne pas se précipiter à enterrer les corps jusqu’à ce que des familles des victimes soient identifiées. Il a dit que l’équipe reviendra sans donner de date précise », indiquent des sources proches du dossier.

La délégation était conduite par un membre du noyau « sécurité » de la présidence.

Enterrés sans enquête

Tous les corps ont été inhumés sur ordre des autorités sans enquête, ce qui étonne des habitants. « Pourquoi refuser des enquêtes avant l’enterrement de ces corps? C’est pourtant simple car nous avons des OPJ (officiers de police judiciaire) et des magistrats payés pour ça. C’est comme si les autorités savent quelque chose qu’elles ne veulent pas nous communiquer. D’ailleurs, nous apercevons des véhicules qui font des navettes dans la nuit vers la Rusizi. Et c’est le lendemain qu’on découvre ces cadavres. On n’en parle pas publiquement, mais les véhicules qui circulent dans la nuit appartiennent aux forces de sécurité.
Certainement, ce sont eux qui emmènent ces cadavres », dénoncent des habitants.

D’après des sources policières qui, des fois sont dépêchées faire le constat, la plupart des victimes présentent des blessures. « Les unes sont bâillonnées, d’autres ont des têtes fracassées […], une preuve qu’elles ont été tuées à bout portant quelque part avant d’être emmenées le long de la Rusizi pour y être jetées. S’il y avait vraiment une volonté des autorités pour identifier les auteurs de ces assassinats, c’est très facile. Mais… », analysent-elles.

Les autorités provinciale et communale ont toujours une même et seule réponse : nous inhumons ces corps pour n’avoir pas été identifiés par les habitants et pour protéger ces derniers contre de probables maladies.

Des habitants eux, dénoncent des promesses d’enquête qui n’aboutissent jamais, « une stratégie de communication empruntée par les autorités pour ne pas dire la vérité », disent-ils en colère.

Selon notre comptage,au moins soixante cadavres ont été retrouvés sur le long de la rivière Rusizi depuis le début de l’année. Moins d’une dizaine a été identifiée.

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Photo : la rivière de Rusizi, séparant la RDC et le Burundi

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