Émission publique : plus de saveur

Émission publique : plus de saveur

Les portes parole des institutions étatiques et para étatiques animent une émission publique chaque trimestre. Mais depuis quelques années, l’événement a perdu sa saveur et son bien fondé. (SOS Médias Burundi)

L’événement a été initié sous la présidence de feu président Pierre Nkurunziza. Tous les portes parole et chargés de la communication des institutions étatiques et para étatiques rencontrent des journalistes des médias locaux. Trois heures durant, ils répondent à des questions des journalistes et du public, ce dernier intervenant par téléphone.

Avant la crise de 2015 qui a poussé une centaine de journalistes à l’exil après la destruction de quatre médias indépendants, tout a changé. « Les journalistes ne se réunissent plus en conférence de presse de façon indépendante et personne n’a le droit de garder secrète une question qu’il pose le lendemain. Au fait la veille de l’émission au soir, nous nous réunissons et les deux animateurs recueillent nos questions pour établir une liste des intervenants. Mais en réalité, la soi-disante conférence de presse a pour but d’informer les portes parole. Les animateurs rapportent à ces derniers ce que chaque journaliste a comme question », révèle un participant habitué à l’émission.

Et de préciser, « Le journaliste de la RTNB (Radio Télévision Nationale du Burundi) qui est animateur principal par exemple a eu lors de la dernière émission une réunion avec les portes parole pour les informer de nos questions. Il a d’ailleurs passé la nuit dans un hôtel où ils se trouvaient ».

Neva pas convaincu

L’émission de ce vendredi se déroule en province de Makamba (sud du Burundi). Les journalistes et leurs médias ont appris l’activité ce mercredi. Et elle a été retardée. « Le chef de l’État ne trouve pas d’importance en cette émission. Il estime qu’elle coûte beaucoup au gouvernement sans rendement palpable », rassure une source proche des organisateurs de l’émission.

Coûts

Normalement, l’émission se déroule en provinces loin de la capitale économique Bujumbura où presque toutes les institutions sont basées. Pour chaque porte parole ou chargé de la communication, en plus des frais de carburant et frais de mission du chauffeur pour ceux qui en ont, le gouvernement débloque 460 mille francs burundais dans deux jours. « Cette somme est également réservée à d’autres participants sélectionnés dont les directeurs des médias publics et proches du gouvernement », indiquent des sources bien informées.

Les journalistes, un seul pour chaque médium pour les médias sélectionnés sauf pour la RTNB et de rares médias, reçoit 72 mille francs burundais.

Différents médias disent qu’il n’y a pas de transparence dans le choix des médias à inviter.

Fête

Il s’agit d’une occasion pour faire la fête, selon un journaliste qui a l’habitude de participer à l’émission. « Après l’émission, nous mangeons et buvons. Les portes parole du gouvernement et du président et l’animateur principal prennent parole. Pendant la fête, les agents en charge de la sécurité des portes parole mangent et boivent aussi. C’est vraiment une opportunité pour faire la fête », dit-il.

Des activistes et journalistes locaux regrettent également « le caractère échappatoire devenu une habitude des portes parole » lors de l’événement.

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Photo d’illustration : des journalistes dans une séance de questions lors de l’émission publique de ce vendredi à Makamba, DR

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