Nduta (Tanzanie) : des inquiétudes persistent après plus d’un mois et demie sans nouvelle de huit réfugiés « disparus »

Nduta (Tanzanie) : des inquiétudes persistent après plus d’un mois et demie sans nouvelle de huit réfugiés « disparus »

Les familles des huit réfugiés burundais enlevés et conduits dans un lieu tenu secret il y a plus d’un mois, s’inquiètent de leur sécurité. Dans l’entre-temps, les conséquences néfastes s’observent dans leur ménage. (SOS Médias Burundi)

La plupart de ces réfugiés burundais sont des chefs de jeunes foyers et ce sont eux qui subvenaient aux besoins de leur famille, les uns faisant le petit commerce, d’autres étant des enseignants ou des volontaires dans des ONGs humanitaires. Ils ont été enlevés vendredi 12 mai dernier par des individus non encore identifiés, certains en tenue de la police tanzanienne, d’autres en tenue civile, tous armés de fusils.

Les familles des concernés soulignent qu’elles ont sillonné tous les cachots du camp sans trouver la moindre trace de ces « victimes de la disparition forcée bien planifiée », selon les réfugiés. La police a expliqué qu’elle ne sait pas le lieu de détention de ces gens car « l’opération a été faite par des policiers venus du chef-lieu du district de Kibondo », ce qui ne convainc pas les réfugiés car « ces policiers non habitués au camp ne pouvaient pas savoir où logent les intéressés ».

Leurs familles s’inquiètent de leur sort

« Tout peut leur arriver : la torture, la mort ou encore la déportation vers le Burundi en catimini », soulignent-elles.

Leurs ménages en souffrent doublement, comme ce sont eux qui subvenaient aux besoins vitaux familiaux.

« J’ai mis au monde le lendemain du kidnapping de mon mari. Je n’ai rien à manger pour pouvoir bien allaiter mon fils car c’est mon mari qui se débrouillait pour faire vivre la famille. Je ne sais pas comment je vais faire vivre cette famille de trois enfants», se désole une jeune femme d’au moins 25 ans dont le mari est parmi les réfugiés jusqu’ici introuvables.

« Je ne parviens pas à répondre à toutes les interrogations de mes enfants qui me demandent toujours où est leur père. Chaque fois qu’ils n’ont rien à manger, ils me demandent où se trouve leur papa, le trauma risque de me surprendre », ajoute cette femme de la zone 13, village 12 au camp de Nduta en Tanzanie.

Elle a saisi des ONGs humanitaires pour l’aider à retrouver son mari, en vain.

« Ces ONGs ne nous aident en rien, elles ont peur de s’attaquer à des questions qui impliquent des autorités tanzaniennes. Normalement c’est DRC (Danish Refugiee Council) qui devrait s’occuper des questions juridiques mais nous constatons que c’est comme sa prédécesseure WLAC (Women’s Legal Aid Centre), elles travaillent sous pression des autorités tanzaniennes et n’osent pas lever le petit doigt quand il s’agit de notre sécurité », commentent des réfugiés intellectuels à Nduta, ajoutant que ces ONGs« se rangent du côté de l’oppresseur alors qu’elles devraient être neutres ». Une situation qui s’observe aussi dans le camp de réfugiés de Nyarugusu, selon eux.

Ces réfugiés demandent à la police et l’administration tanzaniennes de révéler le lieu de détention de leurs compatriotes « S’ils ont commis des infractions quelconques, qu’ils soient présentés devant la justice et qu’ils aient le droit de se défendre », disent-ils.

Ils mettent en garde la Tanzanie en cas de déportation vers le Burundi, qu’elle aura violé la convention 1951 de Genève sur la protection des réfugiés et qu’elle pourrait être tenue responsable devant la justice internationale en cas de faillite à ses obligations.

En 2020, au moins huit autres réfugiés burundais avaient été kidnappés par les services de sécurité tanzaniens avant de se retrouver dans des prisons burundaises. Soupçonnés de « collaborer avec des groupes rebelles », ils ont été libérés en février dernier.

Le camp de Nduta compte plus de 76.000 réfugiés burundais.

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Photo d’illustration : une pancarte qui indique l’emplacement du camp de Nduta en Tanzanie

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