Presse : les reporters d’Iwacu viennent de passer une année en prison
Les quatre journalistes du groupe de presse Iwacu totalisent une année de détention ce jeudi. Des organisations de défense des droits humains et des journalistes demandent au nouveau président de les « gracier », estimant qu’ils sont « injustement emprisonnés ». (SOS Médias Burundi)
Human Rights Watch, Amnesty International ou encore Reporters Sans Frontières disent être déçus par le maintien en détention des quatre reporters d’Iwacu.
Dans une interview accordée à SOS Médias Burundi, Arnaud Froger, responsable Afrique de RSF parle d’une situation très « préoccupante ».
« Ce 22 octobre 2020 marque un bien triste anniversaire pour la presse burundaise puisque ça fait un an que les quatre reporters d’Iwacu sont incarcérés et de mémoire de journalistes burundais jamais des journalistes dans le pays n’avaient fait l’objet d’une détention arbitraire sur une aussi longue durée. C’est donc préoccupant et ça l’est d’autant plus que le nouveau président élu du Burundi n’a rien fait pour mettre fin à la politique de prédation de la presse de son prédécesseur, les intimidations continuent. Nous lui demandons de gracier ces journalistes », indique-t-il avant d’ajouter que leur libération enverrait un signal positif à l’endroit de la presse burundaise qui est à bout de souffle, qui a été victime de pressions et répressions constantes depuis la crise de 2015.
Quant à Rachel Nicholson, chercheuse sur les questions du Burundi et du Rwanda à Amnesty International, elle dit que c’est inadmissible que nos collègues restent en prison.
« Nous sommes évidemment très déçus de savoir qu’un an après leur arrestation, les quatre journalistes du groupe de presse Iwacu restent toujours en prison. Le ministère public n’a jamais présenté de preuves par exemple qu’ils ont été en contact avec les présumés rebelles. On est déçu que jusqu’ici l’appel à la justice n’a pas réussi. Mais on ne va pas laisser tomber cet appel », a-t-elle confié à SOS Médias Burundi.
Du côté de Human Rights Watch, il s’agit d’un message glaçant.
« L ’arrestation et la condamnation de Christine Kamikazi, Agnès Ndirubusa, Égide Harerimana et Térence Mpozenzi à l’issue d’un procès entaché d’irrégularités, est pour HRW un exemple clair de manipulation du système judiciaire dans le but d’étouffer la liberté d’expression. En ce triste anniversaire, nous souhaitons célébrer leur bravoure, mais nos pensées sont aussi avec les journalistes, leurs proches, et leurs collègues, qui paient le prix fort pour leur travail sans relâche. Le message que leur emprisonnement envoie aux journalistes encore au pays est glaçant : traitez des sujets sensibles à vos risques et périls », indique Lewis Mudge, responsable Afrique centrale à Human Rights Watch.
Et de continuer, « Nous souhaitons que la nouvelle administration du président Ndayishimiye, qui ne cesse de répéter que la situation dans le pays est stable et en respect des droits humains, mette fin à toute ingérence politique dans le système judiciaire. Un premier pas urgent serait donc la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les autres personnes emprisonnées pour avoir exercé leurs droits fondamentaux, y compris les quatre journalistes d’Iwacu et les défenseurs des droits humains ».
Quant à Froger, le respect des droits des journalistes s’impose pour le développement du Burundi.
« Cette politique ne peut plus durer, elle n’est pas tenable, le Burundi a besoin d’une information de qualité, les Burundais ont besoin d’être informés et pour cela il faut que les journalistes qui travaillent encore de manière très courageuse puissent exercer leur métier sans crainte de représailles. La libération des journalistes d’Iwacu est un préalable et indispensable, les médias burundais s’en porteront mieux et le Burundi dans son ensemble s’en portera bien mieux. C’est un enjeux tout à fait crucial pour les premiers pas pour le nouveau président du Burundi « , conclut-il.
La chercheuse sur les questions du Burundi et du Rwanda à Amnesty international, elle exhorte le nouveau gouvernement à « changer de direction en ce qui concerne le respect des droits humains, la liberté d’expression et l’accès à l’information ».
Nos confrères et consœurs d’Iwacu ont été condamnés à deux ans et six mois d’emprisonnement par le tribunal de Bubanza (ouest du Burundi) fin janvier cette année.
L’accusation qui a été formulée est « tentative impossible de complicité à l’atteinte à la sécurité de l’État ».
Ils avaient été arrêtés dans la commune de Musigati (province de Bubanza) le 22 octobre 2019 quand ils récoltaient des témoignages auprès d’habitants ayant fui une zone de combats lors des affrontements entre les forces de l’ordre et un groupe armé en provenance de la province du Sud Kivu à l’est de la RDC.
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