Beni (RDC) : une crise de confiance entre l’armée et la population s’installe

Depuis bientôt 6 ans l’armée congolaise s’affronte à des groupes rebelles dont des ADF (Forces Démocratiques Alliées) dans la ville de Beni (Nord-Kivu). Des habitants sont tués, d’autres fuient des zones de combat vers les lieux sécurisés. Les victimes reprochent à l’armée congolaise de ne pas jouer pleinement son rôle. Des sources militaires quant à elles parlent d’une dizaine de soldats tués par des habitants de Beni en quelques semaines seulement. Une crise de confiance s’installe entre l’armée et les habitants. (SOS Médias Burundi)

Dans un point de presse tenu hier par le commandant des opérations Sokola1 dont la mission est de neutraliser les groupes armés dont les ADF à Beni et LUBERO, le Général-Major Peter Kuba Cirimwami a indiqué qu’en l’espace de quelques semaines, plus de 10 militaires ont été tués après avoir été battus par des habitants.

« Nous ne comprenons pas ce qui arrive actuellement aux habitants de Rwenzori. Ils sont en train de tuer nos militaires qui reviennent des fronts, les confondant aux rebelles ADF. En l’espace de quelques semaines seulement, nous avons enregistré plus de 10 militaires tués par des habitants. Si nous voulons gagner la guerre, nous devons collaborer », a insisté le haut gradé.

Selon la Convention pour le Respect de Droits Humains (CRDH), une association qui milite pour la défense des droits humains, les massacres des civils se commettent souvent à quelques mètres des positions militaires et des casques bleus de la Monusco (Mission des Nations-Unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo).
Elle s’indigne que des interventions militaires sont toujours tardives. « Nous ne pouvons soutenir ni collaborer avec une telle armée qui ne veut pas protéger les vies humaines. Nous voulons qu’il y ait des opérations sérieuses qui vont mettre fin aux massacres, ils auront notre soutien », se sont confiés certains membres de la CRDH à SOS Médias Burundi.

Ils proposent par ailleurs aux autorités militaire et administrative de remplacer toutes les unités basées à Beni depuis six ans.

Pour eux, la plupart de militaires déployés dans la zone sont devenus plus commerçants que garants de la sécurité des citoyens.

Des politiciens de la région partagent cet avis. Ils reprochent au gouvernement central de manque de volonté dans le rétablissement de la sécurité.

Toutefois, certains d’entre eux à l’instar de Jean Paul Ngahangondi appelle la population à renouveler sa confiance en l’armée. « Les ADF et Maï-Maï profitent de la mésentente entre nous civils et notre armée pour nous infiltrer, et après ils nous massacrent en nous faisant croire que c’est notre armée qui nous tue. Nous devons nous souder avec l’armée loyaliste et les massacres dans notre territoire vont prendre fin », conseille-t-il.

Certains rescapés rencontrés ne comprennent pas comment les ADF utilisent une même tenue militaire que les FARDC. « Les personnes qui nous tuent depuis des années sont souvent en tenue semblable à celle de notre armée.
Nous ne savons plus faire la différence entre les ADF qui nous égorgent et les FARDC (Armée régulière) qui nous protègent. Voilà pourquoi nous soupçonnons tout individu en tenue militaire », indique Christine*, la trentaine.
Elle a perdu un mari dans des massacres perpétrés par des hommes armés.

En mission sécuritaire à LUBERO et Beni, Carly Nzanzu Kasivita, gouverneur du Nord-Kivu a demandé aux habitants de dénoncer la présence des groupes armés, insistant que  » l’ennemi ne peut pas opérer dans une entité pendant plus de dix ans sans collaborer avec des habitants ».

__________

Photo : un corps d’un militaire tué par des habitants à Lume, secteur de Rwenzori