Bujumbura : la CVR ne cesse de semer le doute

Bujumbura : la CVR ne cesse de semer le doute

La commission vérité et réconciliation (CVR) mène depuis le 22 juillet dernier des enquêtes sur les violations des droits humains commises pendant la crise de 1972. Elle procède aussi à l’exhumation des fosses communes en mairie de Bujumbura. Le président de cette commission a exposé ce jeudi le rapport à mi-chemin de ce travail. Le président de la très contestée commission a affirmé que « des Tutsis ont tué leurs frères en 1972 ». (SOS Médias Burundi)

Dans une conférence de presse, le président de la commission vérité et réconciliation a indiqué que les enquêtes s’étendront sur toutes les 13 zones de la capitale économique Bujumbura.

Pierre Claver Ndayicariye dit que la commission procède à la recherche de la vérité, à l’audition des témoins, des victimes ainsi que d’autres personnes qui acceptent de témoigner.

Dans sa présentation, il a indiqué qu’il y a aussi des Tutsis qui ont été massacrés. « Il y a eu des cas de Batutsi qui ont tenté de s’interposer en faveur des innocents et qui ont été tués par leurs confrères Batutsi », a affirmé le président de la CVR.

Dans le même travail d’enquête, 6 fosses communes ont déjà été découvertes dans la zone de Buterere de la commune Ntahangwa (nord de Bujumbura).

Récemment, le sénat burundais a initié une procédure visant à qualifier de « génocide contre les Hutus » la crise de 1972. Sur la question de qualification de cette crise, M. Ndayicariye a plutôt précisé qu’il n’est pas encore temps pour qualifier ces tueries. « Ici on n’a fait que rapporter les témoignages recueillis. Si les témoignages effectivement disent que la plupart de gens tués étaient d’une seule ethnie, nous l’annonçons comme tel. Ces témoignages ressemblent à ceux déjà recueillis dans d’autres provinces. On ne peut donc dire que seuls les Hutus ont été tués. Mais, précisons simplement que la majorité des victimes étaient des Hutus, et sur base des listes préétablies . Tout de même, rappelons qu’il y a des Tutsis qui ont été assassinés. Certains avaient tenté de protéger leurs camarades Hutus tandis que d’autres ont été victimes des règlements de compte. Aujourd’hui, on ne fait que rapporter les témoignages. Le moment n’est pas de qualifier »,a répondu le président de la très contestée commission.

Quant à la question de savoir le nombre de victimes emportées par cette crise, il a fait savoir qu’il y aura un recensement colline par colline, quartier par quartier, commune par commune, province par province dans le but de déterminer l’identité de toutes les victimes.

La CVR procède depuis fin 2019 à l’exhumation de corps des victimes des massacres de 1972 qui ont emporté plus de Hutus que de Tutsis. Mais elle est accusée par des survivants Tutsis des tueries de 1993 surtout d’être partiale.

Dans certaines provinces, elle a refusé de se rendre sur des sites où sont enterrés des Tutsis dans de fosses communes au moment où dans d’autres, elle a ordonné aux habitants de mentir sur l’identité des victimes, selon ses détracteurs.

Au début de cette année, Pierre Claver Ndayicariye a expliqué aux deux chambres du parlement que sa commission a privilégié les fosses communes des tueries de 1972 « parce-que les témoins et les proches des victimes sont vieux et la majorité est morte au moment où d’autres meurent de chagrin ».

Le Burundi a la même composition ethnique que le Rwanda, son voisin du nord où le génocide contre les Tutsis en 1994 a été reconnu par l’ONU. Selon des sources bien informées, les autorités burundaises veulent « à tout prix qualifier de génocide les massacres de 1972 lors du cinquantième anniversaire de ces massacres en avril 2022 ».

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Photo : Pierre Claver Ndayicariye, président de CVR sur un site de Bukirasazi (Karusi), le 17 février 2020

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