Burundi : la CVR enfonce le clou

Burundi : la CVR enfonce le clou

La très controversée commission vérité et réconciliation (CVR) souhaite une loi sur les sanctions réservées aux personnes qui nient le génocide contre les Hutus au Burundi. Le président de la CVR l’a déclaré la semaine dernière dans la capitale politique Gitega. Une annonce qui déplaît Emmanuel Nkurunziza, secrétaire de l’association AC Génocide Canada qui qualifie le président de la commission de « négationniste ». (SOS Médias Burundi)

Dans le cadre des sessions de discussions organisées à l’endroit de différentes catégories sociales, la CVR a convié les habitants de la capitale politique Gitega à des discussions au Grahd Séminaire de Gitega et à l’université Polytechnique.

La majorité de participants étaient des jeunes gens.

« [….], la CVR qualifie. Nous sommes une commission technique. Phase deux, le parlement a adopté une déclaration le 20 décembre (2021), une déclaration politique du parlement qui entérine ce que nous avons dit. Phase trois : le parlement a déjà donné rapport au gouvernement.Maintenant nos œuvres sont entrées dans le couloir du gouvernement », a indiqué Pierre Claver Ndayicariye président de la CVR, en répondant à un étudiant confus sur la mission et le mandat de la CVR qui a récemment déclaré « les massacres de 1972 ayant emporté plus de Hutus que de Tutsis comme un génocide contre les Hutus au Burundi ».

Et de renchérir avec fierté sous un ton de conviction « Quels seront les résultats entre autres? Premièrement, il va y avoir une loi portant reconnaissance du génocide. Deuxièmement, cela peut aussi engendrer une loi qui sanctionne ceux qui nient qu’il y a eu un génocide au Burundi ».

Et celui qui ne se penche toujours que sur les tueries concernant les Hutus seulement en est plus que sûr.

« Je vous avertis…ça s’appelle lutte contre le négationnisme et le rédutionnisme. Ces lois vont être votées ainsi que d’autres actions qui seront envisagées. Écoutez-moi bien maintenant car c’est très important : la phase quatre consiste à porter le dossier- génocide au niveau diplomatique international. C’est -à -dire au niveau du conseil de sécurité de l’ONU ».

Le secrétaire de l’AC Génocide Canada considère les activités organisées dans la capitale Gitega comme de « sessions d’endormissement » et qualifie le président de la CVR de « négationniste qui s’arroge le droit de désigner qui est négationniste et jure de punir ceux qu’il étiquette ainsi[……] ».

« On reste cependant en droit de se demander quelle organisation conséquente ou quel gouvernement sérieux donnera considération aux actes d’une CVR mise sur pied par des criminels impunis et impénitens […] », estime Emmanuel Nkurunziza, secrétaire de l’association AC Génocide Canada.
Ce spécialiste sur les questions de génocide diplomé de l’université York de Toronto a toujours dénoncé une commission controversée et partiale.

« Nous avons des preuves par exemple dans la commune de Kiremba ( province de Ngozi, nord du Burundi) où des habitants ont été ordonnés de dire que les Tutsis massacrés et enterrés dans une fosse commune en 1993 sont plutôt des Hutus assassinés en 1972 », s’est-il plaint à maintes reprises.

« L’on doit avant tout prêcher par la vérité. Tu ne peux pas prendre des restes humains de Tutsis et les appeler des restes des Hutus. C’est honteux », se révolte M. Nkurunziza souvent.

Le 20 décembre 2021, le président de la très controversée commission a déclaré que les massacres de 1972 qui ont emporté plus de Hutus que de Tutsis constituent « un génocide contre les Hutus du Burundi ».
C’était en marge d’une présentation d’un troisième rapport d’étape aux deux chambres du parlement dans la capitale économique Bujumbura.

Selon la CVR, près de 20 mille restes d’ossements humains ont été exhumés, des milliers de documents relatifs à ces tueries étudiés, au cours des deux dernières années.

Le Burundi a la même composition ethnique que le Rwanda, son voisin du nord où le génocide contre les Tutsis en 1994 a été reconnu par l’ONU.

Au Burundi, malgré la reconnaissance des massacres de 1972 communément connus comme « les événements de 1972 » comme « un génocide contre les Hutus » par les Huts majoritaires au pouvoir aujourd’hui, les deux ethnies peinent encore à se mettre d’accord sur l’appellation des crises qui ont emporté les leurs.

Jusqu’à présent, les Tutsis restent convaincus que la tragédie qui s’est abattue sur les leurs à la suite de l’assassinat du premier président Hutu démocratiquement élu Melchior Ndadaye en 1993 est « un génocide contre les Tutsis »,ce qui préoccupe moins M. Ndayicariye et sa commission qui ont refusé dans certaines provinces d’aller visiter des sites où des fosses communes de Tutsis leur ont été signalées.

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Photo : Pierre Claver Ndayicariye, président de la CVR sur un site d’exhumation de corps par la CVR

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