Burundi-UE : l’Union européenne blanchit le premier ministre Gervais Ndirakobuca

Burundi-UE : l’Union européenne blanchit le premier ministre Gervais Ndirakobuca

L’Union européenne a annoncé la levée des sanctions ciblées contre deux personnalités burundaises à savoir le nouveau premier ministre Gervais Ndirakobuca et le général Godefroid Bizimana, un des conseillers du président Ndayishimiye. Le troisième individu pour lequel l’Union européenne a levé les sanctions est l’ex général Léonard Ngendakumana, un ancien haut cadre des renseignements burundais, en exil depuis 2015. La nouvelle est tombée ce mardi. (SOS Médias Burundi)

Après l’annonce de la mesure par le bureau de la délégation de l’Union européenne au Burundi, des habitants de la province de Cibitoke (nord-ouest du Burundi) , province natale des deux hautes autorités burundaises ont témoigné être très satisfaits de la décision de l’Union européenne.

Mais des activistes et membres des organisations de défense des droits humains estiment qu’il s’agit d’une erreur monumentale.

« Nous sommes très déçus par la décision de l’union européenne de lever les sanctions contre ces personnes qui ont participé à de graves crimes au Burundi. Nous pensons que c’est une décision irréfléchie qui ne prend pas en compte le long terme qui encourage l’impunité au Burundi. C’est difficile de comprendre sur quelle base l’union européenne a levé ces sanctions car aucune des préoccupations qui les avaient justifié n’a été résolue. La décision de lever les sanctions contre les deux autorités de plus haut rang sur la liste de l’UE donne l’impression que l’UE ne se soucie plus des crimes qui ont été commis au Burundi », dit Carina Tertsakian de l’Initiative pour les droits humains au Burundi.

Quant à Anschaire Nikoyagize, président de la Ligue Iteka, il s’agit d’un coup dur pour les victimes.

« Cette décision politique met mal à l’aise les victimes mais on ne désespère pas. J’ose penser que la justice jouera son rôle malgré cette décision. L’UE qui est un des partenaires de la CPI (Cour Pénale Internationale) ne devrait pas sacrifier la justice au profit des relations diplomatiques. Elle devrait continuer à appuyer cette cour pour qu’elle puisse achever son travail et que les auteurs des crimes soient punis », estime Anschaire Nikoyagize, président de la Ligue Iteka.

Selon l’avocat Christian Ntakirutimana, responsable du rassemblement des juristes en action au Burundi, « Si l’UE a pris des sanctions, cela signifie qu’il s’agit de preuves irréfutables que les crimes ont été commis. L’UE restera donc un témoin dans cette affaire le jour où il y aura justice pour les victimes ».

De son côté, Athanase Karayenga, expert en communication trouve que « l’Union européenne s’est beaucoup trompée comme il l’a toujours fait ». Pour lui, il s’agit d’une décision qui favorise les 27 et non les Burundais.

Certaines associations et partis politiques ont salué « une mesure bien pensée, prise sur base des changements opérés dans le pays en matière de respect des droits humains surtout ».

La joie c’est également du côté des autorités burundaises. Le ministre en charge des relations extérieures a pris Twitter pour l’exprimer.

« Je me réjouis de la levée des sanctions ciblées contre deux personnalités burundaises par l’UE. Cette mesure est l’aboutissement du dialogue politique franc, sincère, basé sur la confiance mutuelle et la volonté partagée de réchauffer les liens d’amitié et de coopération avec l’UE », a écrit Albert Shingiro, ministre burundais en charge des relations extérieures.

Pour la chercheuse Tertsakian, cette décision mine l’ensemble du système des sanctions de l’Union européenne. Elle explique que « d’autres gouvernements qui violent les droits humains vont maintenant se dire que s’ils attendent suffisamment longtemps, l’UE va simplement abandonner ses mesures et reprendre ses relations comme si de rien n’était ».

L’Union européenne a maintenu les sanctions contre un agent du SNR (service national de renseignements). Il s’agit de Mathias Joseph Niyonzima, connu sous le sobriquet de Kazungu. Il lui est reproché d’avoir offert des entraînements militaires à des Imbonerakure (membres de la ligue des jeunes du parti présidentiel le CNDD-FDD) en dehors du Burundi et sur le territoire national. Ces derniers étant considérés par l’Union européenne comme « un groupe hostile à l’opposition » et ayant participé dans des actes de répression contre les opposants.

L’UE avait précisé que les personnes visées étaient impliquées dans des actes de violence, de répression, ou d’incitation à la violence, y compris par des actes constituant des atteintes graves aux droits de l’homme.

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Photo d’illustration : Gervais Ndirakobuca, le premier ministre du Burundi

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