Recontre du Pape François avec les victimes de l’Est de la RDC : votre souffrance est ma souffrance (le souverain pontife)

Recontre du Pape François avec les victimes de l’Est de la RDC : votre souffrance est ma souffrance (le souverain pontife)

Le souverain pontife a recentré mercredi après-midi, les représentants des victimes des atrocités commises dans l’Est du Congo où sévissent plusieurs groupes armés locaux et étrangers. Il a également reçu les représentants de réfugiés de plusieurs nationalités dont une Burundaise du camp de Mulongwe basé dans le Sud-Kivu. Il les a écoutés, a prié avec eux et pour eux. Le Pape François leur dit que « votre souffrance est ma souffrance ». Les concernés ont remercié le chef de la cité du Vatican « qui est venu nous consoler ».

(SOS Médias Burundi)

Très attentif et durant longtemps, le Pape François a écouté les témoignages des victimes : enfants, femmes, hommes venus de différentes localités de la région -Est du vaste pays de l’Afrique centrale.

Comme pour leur témoigner son attention particulière, à certains il a donné sa main, offert un chapelet, à d’autres une médaille avant de les bénir.

Elles sont nombreuses, les femmes qui ont témoigné le calvaire que les hommes armés leur ont fait subir. C’est le cas de cette femme qui lève les bras, montrant ses membres amputés, la conséquence d’une attaque d’une violence hors normes.

Bijou Makumbi Kamala est une adolescente native de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Elle a été enlevée par des hommes armés qui l’ont gardée pendant une année et sept mois. Même si elle a réussi à s’échapper, elle dit avoir donné naissance à des jumelles. Ce fruit est issu d’un viol.

La liste des maux est longue : viol, assassinat, mutilation….Des jeunes filles comme Léonie Matumaini, originaire de Beni se souvient de l’horreur dont elle a été témoin.

« Tous les membres de ma famille ont été tués en ma présence et les bourreaux m’ont donné le couteau utilisé pour les tuer afin que je le remette aux militaires ».

Mais elle a pardonné « Je dépose devant la Croix du Christ vainqueur le couteau identique à celui qui a tué tous les membres de ma famille en ma présence ».

Cette photo prise et publiée le 1er février 2023 par les médias du Vatican montre le pape François lors de la rencontre avec des victimes du conflit dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) à la nonciature apostolique à Kinshasa. AFP – SIMONE RISOLUTI

Bijou dont la vie a sombré le matin où elle a croisé des hommes armés alors qu’elle se rendait à la rivière dans le territoire de Walikale, vit un cauchemar insupportable.

« Mes enfants ne connaîtront jamais leur père », se désole celle dont l’agresseur est un chef d’une milice.

« Mes autres amies qui étaient kidnappées avec moi ce jour-là ne sont jamais revenues. Je ne sais pas si elles sont mortes ou si elles sont encore en vie », doute la jeune maman.

Aiméda se souvient avoir été enlevée aussi et faite esclave sexuelle dans le parc de Kahuzi Biega.

En plus des viols collectifs, elle dit que les victimes étaient obligées de manger la chair humaine.

« Chaque jour, cinq à dix hommes abusaient de chacune de nous. Ils nous faisaient manger la pâte de maïs et la chair des hommes », témoigne-t-elle.

Ladislas Kambale qui aura 17 ans en juillet prochain a assisté à l’assassinat de son père, son grand frère a été tué dans des circonstances obscures et sa maman kidnappée par des hommes armés. Elle n’est pas encore revenue.

« Nous ne savons pas ce qu’ils ont fait d’elle », se préoccupe-t-il.

Pour le jeune homme qui n’arrive pas à dormir la nuit, c’est difficile de comprendre « une telle méchanceté- cette brutalité quasi animale ».

Deuxième de sa famille, cet écolier de la sixième année originaire du territoire de Beni a vécu des moments horribles le jour du meurtre de son papa.

« Mon père lui, a été tué en ma présence. J’ai suivi comment ils l’ont découpé en morceaux, puis sa tête tranchée a été placée dans une marmite », a-t-il dit ,rappelant qu’il vit maintenant avec ses deux sœurs.

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L’orphelin a également choisi de pardonner.

« Moi et les autres enfants qui sont ici, avons pardonné à nos bourreaux. Cest pourquoi je dépose devant la Croix du Christ vainqueur, la machette identique à celle qui a tué mon père ».

Les hommes de Dieu n’ont pas été aussi épargnés par la violence inouïe qui ravage l’Est du pays le plus riche en minerais.

« J’ai vu la sauvagerie: des gens découpés comme on découpe la viande à la boucherie, des femmes éventrées, des hommes décapités », énumère l’abbé Guy-Robert Mandro Deholo, mutilé des doigts de la main. Il a présenté le témoignage d’un certain Désiré Dhetsina, qui a disparu il y a quelques mois, sans laisser de nouvelles.

Dans le témoignage qu’il avait préparé avant sa disparition, ce survivant du camp de déplacés de Bule, dans la chefferie des Bahema Badjere sur le territoire de Djugu, parle d’un plan d’extermination, d’anéantissement physique, moral et spirituel qui se poursuit tous les jours.

Les victimes ont remercié le saint Père qui est venu « nous consoler ».

Réfugiés

Celui qui se considère comme « pèlerin de la paix » a aussi rencontré à la Nonciature à Kinshasa les représentants des réfugiés de plusieurs nationalités dont une Burundaise. Angélique Malipo est basée dans le camp de réfugiés de Mulongwe, installé dans le Sud-Kivu.

Le pape François rencontre des victimes du conflit de l’est du pays, à la nonciature apostolique, lors de son voyage apostolique, à Kinshasa, en République démocratique du Congo, le 1er février 2023. via REUTERS – VATICAN MEDIA 

Elle a représenté les occupants de Mulongwe et Lusenda, un autre camp de réfugiés burundais se trouvant dans le Sud-Kivu, estimés à 41.836.

« Nous lui avons remis une lettre qui dénonce les violences dont nous sommes victimes, nous lui avons fait part des assassinats, des harcèlements, des viols sexuels auxquels nous sommes soumis chaque jour », a-t-elle révélé à SOS Médias Burundi.

Angélique Malipo se sent soulagée.

« Je suis très heureuse que le Pape ait reçu la lettre lui adressée par les réfugiés burundais de Mulongwe et Lusenda. Il sera au courant de notre situation quand il lira cette lettre ».

Le Pape François a dénoncé les forces externes et internes qui « pillent cette partie du Congo », occupent les villages et s’adonnent aux tentatives de « partition de cet espace ».

Aux victimes, le souverain pontife a dit « votre souffrance est ma souffrance », appelant à l’arrêt du pillage des ressources minières de la RDC qui, selon lui font des victimes innocentes.

Goma sans bénédiction

Initialement, le Pape François devrait se rendre à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu à l’Est, selon un programme qui avait été publié en juillet dernier avant que son voyage ne soit reporté suite aux problèmes persistants au genou. Cela n’a pas été le cas.

« J’aurais aussi aimer aller à Goma mais avec la guerre on ne peut pas y aller » , a confié le tout premier Pape d’origine sud-américaine de l’histoire dans l’avion ce mardi. La région est en proie aux combats entre le groupe armé M23 et les FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo).

« Le monde nous a oubliés », se lamentait l’évêque de Goma, Mgr Willy Ngumbi Ngengele, il y a quelques jours.

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Le Pape François prie pour une femme-victime des violences et atrocités commises dans l’Est du Congo, crédit photo : AP

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