Bujumbura : les chefs d’Etat de l’EAC appellent de nouveau à un cessez-le-feu immédiat dans l’est du Congo
D’une façon la plus extraordinaire, les chefs d’État de la communauté Est-Africaine se sont rencontrés à Bujumbura, la capitale économique du Burundi, ce samedi 4 février 2023. La situation sécuritaire qui prévaut à l’est du Congo était à l’ordre du jour de ce sommet qui a vu la participation de tous les présidents à l’exception du Sud-soudanais qui s’est fait représenter. Dans le communiqué final, il a été décidé que les protagonistes doivent déposer les armes pour un dialogue immédiat.
Le sommet a observé que la situation sécuritaire dans l’est de la RDC est une question régionale qui ne peut être que durablement résolue par un processus politique . Il a mis en évidence la nécessité d’un dialogue renforcé entre toutes les parties. Mais les groupes armés locaux exigent des préalables dont le départ des groupes armés étrangers basés sur le sol congolais pour « capituler ». (SOS Médias Burundi)
Les chefs d’ État de la sous-région ont exigé un cessez-le-feu immédiat pour toutes les parties armées y compris tous les groupes armés étrangers et a ordonné aux chefs des forces de défense de se réunir en une semaine et établir de nouvelles échéances pour le retrait et recommander le plan de déploiement approprié, a indiqué Peter Mathuki, secrétaire général de l’EAC qui a lu la déclaration sanctionnant la rencontre.
En outre, le sommet exige que ce processus soit accompagné de dialogue.
« Les violations doivent être signalées au président du sommet pour consultation immédiate avec les membres du sommet. »
Selon toujours le communiqué final, le collègue invite tous les pays fournisseurs de troupes à les déployer immédiatement et exhorte la République Démocratique du Congo à « faciliter dans les plus brefs délais le déploiement des troupes du Soudan du sud et de l’Ouganda à la force régionale de l’Afrique de l’est ».
Finances
Un autre point important concerne les finances. Des pays comme le Rwanda, la Tanzanie, le Kenya et l’Ouganda ont promis de contribuer financièrement.
En dehors de cette communauté, les autres fonds viennent des Nations-Unies, de l’Union africaine, du Royaume-Uni et du Sénégal.
Pas de photo de famille
Pendant le sommet, des dizaines de journalistes présents à Ntare House (Office du président burundais) avaient été préparés pour une photo de famille.
A la surprise de tous, la présidente de la Tanzanie, Samia Suluhu Hassan est sortie avant la clôture des activités.
Tout le monde a pensé à une urgence.
La situation a inquiété plus d’un quand le président Yoweri Kaguta Museveni de l’Ouganda est sorti quelques minutes après.
« Mésentente ! Mauvaise augure. Oh! Mon pauvre Congo », a murmuré un journaliste de la délégation congolaise. Il soupire.
La famille n’étant plus au complet, la photo de famille prévue avec des autocollants estampillés des images de chaque pays, montrant là où devait se mettre chacune des 7 personnalités, n’a pas été prise.
Le communiqué sanctionnant le sommet a été lu en début de soirée.
Kagame tant attendu au Burundi
Enfin, les Burundais ont revu Kagame dans leur pays après près de 10 ans. Le Burundi et le Rwanda, deux pays voisins de la région des Grands-Lacs d’Afrique viennent à peine de renormaliser leurs relations, tendues depuis 2015. En marge de ce sommet, en plus de l’accolade entre les présidents Ndayishimiye et Kagame qui en dit long, les deux hommes ont eu un tête-à-tête.
Même si leurs services de communication n’ont pas révélé sur quoi ont porté les discussions, la plupart d’observateurs estiment que M. Ndayishimiye n’a pas manqué de répéter à son homologue son plus grand souhait, celui des autorités burundaises : « la remise des présumés putschistes exilés au Rwanda après le coup d’Etat raté contre son prédécesseur en mai 2015 pour qu’ils soient jugés au Burundi ».
« Sans doute que le président Kagame a demandé à son hôte de demander à certains de ses collaborateurs de cesser de collaborer avec les génocidaires rwandais FDLR et de ne plus laisser son territoire servir de chemin pour les membres des groupes armés qui combattent le pouvoir de Kigali basés dans le Sud-Kivu », estime un journaliste, spécialiste de la région des Grands-Lacs.
Réponses des groupes armés
Certains groupes armés ont réagi aux exigences du sommet de Bujumbura. C’est le cas notamment des Maï Maï Biloze Bishambuke.
« Il faut que tous les groupes armés étrangers regagnent leurs pays d’origine, notamment le M23 soutenu par le Rwanda, les Red Tabara, FDLR, Imbonerakure, FNL, Forebu, CNRD… car il n’y a aucun mouvement d’auto- défense d’origine congolaise qui se trouve au Rwanda, Burundi,en Ouganda pour semer l’insécurité dans ces pays et les déstabiliser », a réagi Aimable Nabulizi, porte-parole des Maï Maï Biloze Bishambuke.
Pour ce groupe rebelle qui se qualifie de mouvement d’auto-défense, les zones tampon dans le Nord-Kivu doivent être supprimées.
« Si l’EAC est venu pour aider les FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) , elle doit aller aux fronts attaquer le M23, dans le cas contraire, la force régionale doit être remplacée en RDC car elle est au service du M23 », accuse Nabulizi qui reproche aussi au Rwanda et à l’Ouganda de soutenir le M23. Le Rwanda a toujours nié les accusations selon lesquelles il soutient l’ancienne rébellion Tutsi qui a repris les armes fin 2021, reprochant aux autorités congolaises de n’avoir pas respecté ses engagements sur la réinsertion de ses combattants.
Tshisekedi hausse le ton
Dans une vidéo, le président congolais Félix Tshisekedi est vu en train de parler au président kényan William Ruto et au commandant en chef de la force régionale ,le général major Jeff Nyagah,d’origine kényane.
« Vous n’êtes pas venus pour favoriser le M23 et c’est très dommage que la population s’en prenne à vous. Vous êtes venus pour nous aider, vous n’êtes pas venus pour avoir des problèmes. Donc, soyez vraiment attentif à ça, soyez attentif à ça, répondez aux questions de la population, communiquez avec la population », a insisté le chef de l’État congolais sur un ton sévère.
La force régionale décidée par les chefs d’Etat de la communauté Est-Africaine fin juin 2022 est perçue par une partie de la société civile, des politiciens, autorités groupes de pression congolais comme étant « complice ». Il lui est reproché de ne pas » attaquer le M23″ et de » servir seulement d’arbitre ».
Récemment, plusieurs personnes dont des journalistes ont été blessées à Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu dans une manifestation contre cette force.
Selon des journalistes locaux, une manifestation du genre est prévue ce lundi dans la plus grande ville de l’est du Congo.
Ce dimanche, plusieurs jeunes ont investi les rues de Goma et bloqué une avenue principale pour « dénoncer l’issue du sommet de Bujumbura ».
« Ce lundi, c’est une manifestation de grande envergure qui est prévue », a indiqué un journaliste local.
La police a dégagé la rue,selon des sources locales.
Lors de son récent déplacement à Kinshasa, la capitale congolaise, le Pape François a appelé à « l’arrêt des violences » dans l’est du Congo », reprochant à la communauté internationale de « s’être résignée à la violence qui dévore le peuple congolais » . Le souverain pontife a rencontré les représentants des victimes des atrocités commises dans l’Est du vaste pays de l’Afrique centrale et leur a dit « votre souffrance est ma souffrance ».
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Photo : le secrétaire général de l’EAC Peter Mathuki accueille les chefs d’Etat de l’EAC dans une salle où s’est déroulée leur rencontre à huis-clos à Bujumbura, le 4 février 2023
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