Burundi : la CVR appelle aux présumés coupables des différents massacres de demander pardon

Burundi : la CVR appelle aux présumés coupables des différents massacres de demander pardon

La commission vérité et réconciliation (CVR), a clôturé provisoirement ses travaux d’enquêtes sur les tueries et les violations des droits humains commises en 1972 dans la capitale économique Bujumbura qui, à cette époque était la capitale politique. C’était ce mardi. Le président de ladite commission a indiqué que 154 témoins des événements de 1972 ont été reçus et ont raconté leurs versions des faits. Il est prévu des séances d’auditions publiques des autres témoignages sur les tueries de 1972 avant la fin de cette année. (SOS Médias Burundi)

Dans son discours de clôture, le président de la très controversée commission a indiqué que les témoignages racontés sans préciser les critères de choix des témoins sont quasi concordants sur les responsabilités des uns et des autres en 1972. « Les tueries de 1972 étaient coordonnées par le service de sûreté (équivalent au service national de renseignements d’aujourd’hui), les parquets, certains fonctionnaires, la police, l’armée ainsi que la jeunesse du parti Uprona JRR (Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore) », a dit Pierre Claver Ndayicariye, tout en précisant que les deux principales ethnies du pays ont été touchées. « Et des Hutus et des Tutsis, tous ont été tués. Il y a des Tutsis qui ont été tués parce qu’ils ont voulu protéger des Hutus, ou des Tutsis qui ont été tués par leurs frères à cause des règlements de comptes. Il y a aussi des Hutus qui avaient été arrêtés mais qui ont été libérés par des connaissances dans l’armée », a-t-il affirmé.

Le président de la CVR a annoncé la prochaine étape des auditions publiques des témoignages sur les évènements malheureux du passé. « Nous allons entendre publiquement ceux qui veulent témoigner sur le passé douloureux du pays. Nous demandons aux présumés coupables des crimes du passé de venir à la CVR pour demander pardon aux Burundais. Ceux qui vont accepter de le faire ne feront pas objet de critiques lors de ces séances des auditions publiques », a-t-il insisté.

M. Ndayicariye a également fait savoir que sa commission veut mener un recensement de toutes les personnes tuées ou portées disparues lors de différentes crises. « D’ici avant la fin de l’année, ce recensement aura été lancé ».

Selon des observateurs, la commission vérité et réconciliation est accusée d’être partiale dans ses travaux de recherche de la vérité. « Dans la plupart de ses travaux, elle cherche à montrer qu’une seule ethnie a été victime des crimes du passé. En trainant sur les évènements de 1972, elle veut montrer que seuls les Hutu ont été victime de ce passé douloureux dont elle parle », estiment-ils.

Des habits des personnes tuées en 1972 au nord de Bujumbura
Des habits des personnes tuées en 1972 au nord de Bujumbura

Sur la question, M. Ndayicariye rassure. « Toutes les périodes ayant été marquées par ses crises notamment 1988, avec la crise dite de Ntega-Marangara, 1993, 1965, toutes feront objet d’enquête et de qualification des faits », explique-t-il.

La CVR procède depuis fin 2019 à l’exhumation de corps des victimes des massacres de 1972 qui ont emporté plus de Hutus que de Tutsis. Mais elle est accusée par des survivants Tutsis des tueries de 1993 surtout d’être partiale.

Dans certaines provinces, elle a refusé de se rendre sur des sites où sont enterrés des Tutsis dans de fosses communes au moment où dans d’autres, elle a ordonné aux habitants de mentir sur l’identité des victimes, selon ses détracteurs.

Au début de cette année, Pierre Claver Ndayicariye a expliqué aux deux chambres du parlement que sa commission a privilégié les fosses communes des tueries de 1972 « parce-que les témoins et les proches des victimes sont vieux et la majorité est morte au moment où d’autres meurent de chagrin ».

Le Burundi a la même composition ethnique que le Rwanda, son voisin du nord où le génocide contre les Tutsis en 1994 a été reconnu par l’ONU. Selon des sources bien informées, les autorités burundaises veulent « à tout prix qualifier de génocide les massacres de 1972 lors du cinquantième anniversaire de ces massacres en avril 2022 ».
Récemment, le sénat burundais a initié une procédure visant à qualifier de « génocide contre les Hutus » la crise de 1972.

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Photo : des commissaires de la CVR et des administratifs à la base sur un site de Buterere, nord de la ville de Bujumbura

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