Tanzanie : une délégation-témoin décriée par les réfugiés

Tanzanie : une délégation-témoin décriée par les réfugiés

Il s’agit d’une délégation constituée de réfugiés dont des hommes d’Églises, d’agents du HCR et de représentants du gouvernement tanzanien. La délégation se rend au Burundi pour constater la situation sécuritaire dans le cadre de sensibiliser les réfugiés à rentrer en grand nombre. Les réfugiés décrient « une délégation constituée des personnes qui ne nous représentent pas pour poursuivre la politique de nous forcer au rapatriement ». (SOS Médias Burundi)

Les membres de la controversée délégation ont été choisis dans les camps de Nduta et Nyarugusu. Et la délégation a pris le départ vers le Burundi ce lundi.

Des réfugiés disent que les membres de la délégation ont été nommés ou désignés en toute discrétion.

« Normalement je suis beaucoup informé ici et je suis de près tout ce qui se passe dans le camp. Comme volontaire, je côtoie beaucoup de gens et de catégories sociales différentes, mais je n’ai su l’information concernant cette délégation qu’hier dans l’après-midi, quand elle était déjà partie. C’est à dire que la discrétion autour de la mission est vraiment exceptionnelle « , s’étonne un réfugié burundais, intellectuel du camp de Nduta.

Pas de confiance

Parmi les gens déjà identifiés comme membres de la délégation, un chef de la zone III et deux pasteurs des églises protestantes à Nduta. Et au camp de Nyarugusu, deux agents du HCR, un représentant du gouvernement tanzanien, le vice-président du camp et quatre autres réfugiés burundais ont été choisis pour faire partie de la mission.

«Tous ces réfugiés travaillent normalement de mèche avec le gouvernement burundais. Certains d’entre eux sont d’ailleurs des Imbonerakure (membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD). On les a déjà vus nous sensibiliser au rapatriement. Ils ne sont pas en réalité nos représentants et n’ont pas notre approbation car n’étant pas choisis ou élus par nous », laissent entendre des réfugiés burundais.

Mission-témoin

Avant de prendre le départ, la délégation a eu un briefing: Vous serez accueillis par les autorités burundaises qui vous aideront à sillonner les provinces qui ont plus de réfugiés en Tanzanie, constater la paix et la stabilité, s’enquérir de la situation des droits humains et revenir donner rapport pour en fin sensibiliser les réfugiés au retour volontaire.

Pour les réfugiés, la mission confiée à la délégation est impossible.

« Nous savons ce que nous avons fui, personne ne peut nous forcer au rapatriement si ce n’est pas de notre propre volonté. Et puis, est-ce qu’ils vont arriver sur toutes nos collines d’origine? Impossible. Qu’ils aillent faire leur voyage et donner rapport de notre persécution aux autorités burundaises qui les ont envoyés ici, mais ils n’auront pas la chance de nous convaincre », estiment des Burundais dans les deux camps en Tanzanie.

En septembre 2021 et mars dernier, une telle mission a été organisée mais les réfugiés ignorent le rapport qui en est sorti.

« Ce que nous savons est que depuis ces dates, des mesures draconiennes dans les camps ont été intensifiées, ce qui signifie que le rapport n’a pas eu d’effets positifs escomptés», indiquent-ils.

L’ONU saisie…

Les réfugiés burundais en Tanzanie lancent pour la énième fois une alerte à l’ONU.

« Nous en appelons au haut-commissaire du HCR, Filippo Grandi qui nous a rendu visite l’an dernier, de prendre connaissance de cette maltraitance qui nous est infligée en complicité avec le HCR-Tanzanie pour qu’il se saisisse de notre cas. Qu’on nous laisse le choix de prendre une décision sur notre retour ou non au pays natal », précisent des réfugiés burundais qui comptent lui écrire une correspondance.

« Nous craignons qu’au retour de cette mission jugée décisive et de taille, il y aura des mesures coercitives dures pour nous contraindre au rapatriement forcé, raison pour laquelle nous lançons un cri d’alarme aussi aux activistes des droits humains pour plaider en notre faveur », désespèrent-ils.

Les camps de réfugiés de Nduta et Nyarugusu en Tanzanie comptent plus de 126 mille Burundais.

Récemment, les renseignements tanzaniens ont dévoilé que 137 intellectuels réfugiés burundais ont été tués lors des six dernières années sur le sol tanzanien, les raisons politiques étant parmi les mobiles des assassinats ciblés.

_______________________

Photo d´archives : rassemblement de femmes burundaises pour la récolte du bois de chauffage au camp de Nduta (Tanzanie)

Previous Gisozi : un chef de colline en détention
Next Bubanza : neuf bars fermés pour non respect des prix officiels