Mahama (Rwanda) : Handicap International ferme ses bureaux au désavantage des réfugiés
L’ONG qui s’occupe d’une grande partie du volet santé laisse derrière elle plusieurs cas graves ophtalmologiques non traités. Certains ont déjà atteint le stade de cancer. Les plus nécessiteux lancent un cri d’alarme. Le manque de financements est la raison principale de son départ. (SOS Médias Burundi)
Officiellement, Handicap International n’opère plus au camp de réfugiés de Mahama au Rwanda depuis le 31 juillet dernier. Ses principaux bureaux des villages 10 et 11 sont fermés.
L’on ne sait pas encore si tel est le cas dans d’autres camps du pays.
Les raisons ne sont pas encore annoncées mais, le staff et les volontaires de cette ONG parlent de crise de financements.
A Mahama, cette ONG s’occupait notamment de la santé mentale et communautaire ainsi que des cas d’handicap physique et de kinésithérapie. Elle avait aussi un volet d’encadrement des jeunes et de prise en charge des personnes les plus âgées.
Depuis la période de Covid-19, c’est Handicap International qui prenait aussi en charge des cas d’ophtalmologie majeure.
Dans ce domaine, des centaines de cas graves de personnes qui nécessitent des opérations ophtalmologiques se voient laissées pour compte.
Le cas le plus emblématique est celui d’une femme qui vient de faire trois mois au centre de santé de la zone de Mahama II géré par Save The Children.
« Son œil pourri a été enlevé et ne reste qu’un trou qui pue. Elle occupe sa chambre seule et personne ne peut presque y entrer. Elle devait subir une opération à l’Hôpital spécialisé de Kabwayi au sud du Rwanda mais Handicap International lui a signifié qu’il n’y a pas de fonds pour ce transfert », raconte un volontaire médical.
Le cas n’est pas isolé, ajoute-t-il, parlant de plusieurs autres personnes devenues aveugles par manque de traitement approprié, ceux atteints de cancer de l’œil, des rendez-vous de transferts et d’opérations chirurgicales non suivis, etc.
« Depuis le début de cette année, seuls deux convois de transfert vers l’hôpital de Kabwayi ont été faits avec moins de 25 patients. Alors qu’avant, les transferts après consultations se faisaient deux fois la semaine ou le mois. Vous comprenez que tous ces cas non traités se sont malheureusement aggravés », déplore-t-il.
Handicap International avance un manque de financements comme motif, d’abord de la part du HCR, son partenaire principal et ensuite de la part de ses donateurs internationaux.
« Actuellement, les moyens sont orientés dans d’autres pays les plus nécessiteux et en guerre comme au Moyen-Orient. Alors, nous qui sommes dans des pays jugés relativement sûrs ne recevons plus des subsides », explique le staff de cette ONG.
Les services de Handicap International seront transférés chez Save The Children et Prison Fellowship au camp de Mahama situé à l’Est du Rwanda.
« Là aussi, c’est une sorte de transfert de problèmes car ces ONG souffrent elles aussi de crise de fonds, et donc on ne peut s’attendre à aucune amélioration si jamais les partenaires ne comprennent pas que les camps de réfugiés doivent être prioritaires…», analyse un cadre de l’une de ces ONG dans le camp de Mahama.
Les bénéficiaire des services initialement offerts par Handicap International se sentent délaissés et appellent au secours. Ils estiment que Save The Children et Prison Fellowship pourraient « ne pas satisfaire nos besoins les plus spécifiques ».
Depuis la fin de l’année dernière, le HCR et le PAM (Programme Alimentaire Mondial) ont réduit considérablement la quantité et le montant de l’assistance accordée aux réfugiés au Rwanda en général.
Les deux agences onusiennes avaient expliqué que les réductions sont dues à une diminution significative des ressources affectées à l’aide aux réfugiés, précisant qu’elles n’ont reçu que 37% du budget attendu en 2023 pour venir en aide à tout ce monde, ce qui leur est impossible de continuer au même rythme. Elles craignaient le pire en 2024.
Les réductions devraient affecter l’aide en espèces pour les articles non alimentaires ainsi que l’aide en espèces pour l’énergie et le gaz combustible destinées aux réfugiés vivant dans les camps. Par ailleurs, les orientations et transferts des malades nécessiteux vers les services de santé en dehors des camps ont été limités aux cas d’urgence extrême uniquement.
Pour les réfugiés et leurs leaders, cette réduction ne devrait pas aussi inclure l’assistance sanitaire. Ils demandent que la situation change et que le HCR s’occupe véritablement des cas de maladies graves en commençant par des maladies chroniques et ophtalmologiques.
Mahama abrite plus de 63.000 réfugiés dont plus de 40.000 Burundais, le reste étant des Congolais dont la plupart ont récemment fui les combats à l’est du vaste pays de l’Afrique centrale, le Congo.
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Photo : des anciens bureaux de l’ONG Handicap International au camp de Mahama au Rwanda ©SOS Médias Burundi
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