Burundi : la CNIDH retrouve son statut A

Burundi : la CNIDH retrouve son statut A

Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a ré-accrédité la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme au Burundi au statut A. L’organe public burundais avait été rétrogradé en 2018 en raison de la non indépendance face aux violations graves des droits humains. L’ONU estime qu’un pas a deja été franchi dans le bon chemin. (SOS Médias Burundi)

En mai 2016, l’ONU avait entrepris un examen spécial du statut d’accréditation de la CNIDH, à la demande de la Fédération Internationale des Droits Humains et son organisation membre au Burundi, la Ligue ITEKA.

Et pour cause, “depuis avril 2015, la CNIDH a en effet cherché à minimiser voire passer sous silence les crimes commis par le régime en place, et son président a mené une campagne à l’encontre de la société civile indépendante, notamment afin d’empêcher le travail des défenseurs des droits humains”, avait argumenté la FIDH.

Deux ans plus tard, la CNIDH, qui bénéficiait jusque-là du statut A, s’est vu rétrogradée au Statut B, les Nations-Unies ayant jugé qu’elle ne respectait plus pleinement son mandat d’institution indépendante de protection et promotion des droits humains.

La CNIDH a alors entamé des démarches de recherche du statut A. Le combat est gagné. La semaine dernière, l’office des droits de l’homme a ré-accrédité la commission burundaise au premier statut A. “Nous estimons que la CNIDH est sur le bon chemin et l’encourageons à aller de l’avant pour prouver sa réelle indépendance dans la promotion, la protection et le respect des droits humains dans le pays”, explique l’office onusien.

La CNIDH jubile

Dans sa déclaration, le président de la CNIDH, promet d’être vigilant. “La CNIDH a le plaisir d’annoncer à l’opinion nationale et internationale qu’elle vient d’obtenir sa ré-accréditation au Statut A. La CNIDH, quant à elle, réaffirme son engagement à bien accomplir sa triple mission, à savoir la protection, la promotion et le rôle consultatif dans le domaine des droits de l’homme”, a souligné Sixte Vigny Nimuraba, actuel président de la CNIDH.

Mr Nimuraba, prend aussi pour témoin la population. “La CNIDH lance enfin un appel vibrant à tous les Burundais de travailler en synergie pour faire du Burundi un État légendaire dans le respect des droits de de l’homme, en combattant toute personne qui tenterait de porter atteinte aux droits de l’homme”, ajoute-t-il.

Réactions mitigées

Pour la société civile au Burundi, c’est un pari gagné. “C’est un grand succès pour nous qui avons dénoncé cette sous-estimation de la CNIDH car elle n’aurait pas dû encaisser injustement un tel coup. Heureusement qu’elle vient d’être rétablie dans ses droits. L’actuelle commission fait tout pour le respect des droits humains en témoignent des descentes dans des prisons, des réunions avec la société civile, des médias rouverts, des prisonniers libérés, etc”, a réagi Gérard Hakizimana, président de l’organisation FOULON F.

Cependant, les activistes externes grincent les dents. “C’est vraiment honteux et étonnant. Il s’agit d’une commission qui a excellé par sa dépendance au pouvoir Cndd-Fdd. À titre d’ exemple, le président de la chambre basse du parlement a récemment ordonné le changement et l’omission de certains éléments gênants du rapport annuel 2020 et la CNIDH a directement obtempéré”, indique Gervais Nibigira, vice-président du Réseau des Citoyens Probes.

Et puis, ajoute cet activiste en exil, “la CNIDH est dans la cadence du pouvoir et s’empresse à nier des rapports accablants des violations des droits humains comme des tueries, des arrestations et des emprisonnements arbitraires, des disparitions forcées, des cas de torture, alors que les faits parlent d’eux mêmes. Et, elle ne mentionne jamais ces cas de violations des droits humains de peur d’être mal vue par le pouvoir”.

Le statut A confère aux commissions nationales des droits humains des pays un label d’indépendance par rapport aux autorités en place pour répondre aux besoins des populations nécessiteuses. Elles obtiennent aussi un droit de parole dans le concert des Nations Unies et deviennent le seul interlocuteur en matière des droits humains.

Le ministre de la diplomatie burundaise parle de ré-accréditation méritée. Albert Shingiro estime qu’il s’agit d’un autre point marqué sur le tableau de la normalisation des relations entre le Burundi et l’ONU.

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Photo : Sixte Vigny Nimuraba, président de la CNIDH

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