Burundi : les hallucinations du président Neva
Le président burundais Évariste Ndayishimiye a déclaré fin février que le jardin d’Éden se trouvait au Burundi et que les Américains boivent l’eau en provenance du Burundi. Selon celui qui dirige l’un des pays les moins visités au monde et dont les sites touristiques ne sont pas mis en valeur et sans statistiques de touristes chaque année, les étrangers qui se rendent dans « son jardin d’Éden y sont maintenus par une sorte d’aimant ». (SOS Médias Burundi)
Les hallucinations du chef de l’Etat burundais se sont révélées le 27 février dernier. Ce jour-là, Évariste Ndayishimiye participait au lancement des états généraux sur le tourisme.
« Quand Dieu a chassé Adam et Eve du jardin d’Éden, il y a posté des anges qui agitent des épées flamboyantes pour qu’Adam et Eve n’y retournent pas….L’Arche de Noé est partie du Burundi je vous dis. Cette pluie torrentielle qui a causé les inondations était mêlée de vent très violent. Le bateau se trouvait au Burundi et le vent l’a soulevé très haut, l’a transporté très loin. Après le déluge, l’Arche se trouvait déjà en Israël. Quand ils ont vu une rivière qui s’y trouvait, ils ont cru à la Rusizi (rivière séparant le Burundi et la RDC). Et les rivières qui entourent le jardin d’Éden ce sont : Rusizi, Ruvubu, Maragarazi et la Kanyaru (rivière séparant le Burundi et le Rwanda) », a déclaré M. Neva, apparemment convaincu, devant un auditoire quelque fois gêné et applaudissant très timidement.
Selon le président burundais, la plupart de ses sujets n’y croient pas « du fait que les chérubins aux épées flamboyantes les aveuglent ».
Les étrangers attirés par le Burundi ?
Le président Ndayishimiye affirme qu’il existe une sorte d’aimant qui maintient tous les visiteurs qui arrivent dans son pays pour la première fois.
« Allez demander aux étrangers qui viennent au Burundi. Ils vous diront qu’il y a une sorte d’aimant qui les neutralise et pensent se retrouver dans les cieux », a-t-il essayé de convaincre des ministres, représentants des agences onusiennes et ONGs, cadres du gouvernement burundais et plusieurs autres invités.
Et d’insister en donnant un exemple « Demandez au représentant du PNUD (Programme des Nations-Unies pour le développement) qui est parmi nous, récemment la représentante régionale du PNUD est venue et a visité le Burundi. Elle a sollicité que je la reçoive à deux reprises. Quand elle est arrivée, elle m’a demandé de la laisser d’abord sillonner tout le Burundi pour que je puisse l’accueillir après avoir parcouru le pays. La première chose qu’elle m’a dit, demandez au représentant du PNUD il est mon témoin, elle m’a dit ceci : vous avez le plus beau pays du monde ». Toutefois, la petite nation de l’Afrique de l’est ne dispose d’aucune statistique sur les touristes qu’elle reçoit chaque année.
Mais le chef de l’État sait qu’il est le seul convaincu de ses déclarations.
« Vous ne le remarquez pas parce que quand Adam et Eve ont péché, après les avoir chassés du jardin d’Éden, Dieu y a placé des chérubins aux épées flamboyantes. Vous, vous ne pouvez pas le voir malgré votre présence. Dieu nous a révélé que c’est ici le jardin d’Éden. Le Burundi est le jardin d’Éden », a-t-il martelé.
Les Américains boivent l’eau en provenance du Burundi
Le président Neva a vanté comment il est arrivé à convaincre un ressortissant américain qui s’est retrouvé au Burundi après lui avoir expliqué comment les Américains boivent l’eau en provenance du Burundi.
« Un Américain s’est retrouvé au Burundi sans qu’il l’ait planifié. Il est originaire de la Californie à Los Angeles. Comment ça s’est passé ? Nous étions dans un restaurant et avons commencé à discuter et je lui ai défié : vous buvez notre eau mais ne nous donnez rien en retour. Et de répliquer : nous buvons vraiment votre eau ? Après quelques heures de discussions je lui ai dit d’ouvrir dans Google F. Je lui ai alors dit : voilà l’eau du Burundi, elle quitte le lac Tanganyika, se jette dans la rivière Rukuga, la Rukuga se jette dans le fleuve Congo et le fleuve Congo se jette dans l’océan Atlantique. Or, l’océan Atlantique est lié à l’océan Pacifique. Ne sommes-nous pas sur l’océan Pacifique ? Ne viens-tu pas de boire notre eau maintenant ? »
Mais le président burundais qui parlait à un auditoire qui ne posait pas de question n’a pas précisé si ce ressortissant américain a été retenu par l’aimant qui maintient tous les visiteurs qui arrivent dans son pays ou non.
Éden des contes
Selon le plus célèbre activiste burundais Pacifique Nininahazwe, le président burundais devrait faire en sorte que le Burundi soit le vrai Éden actuel et non celui des contes.
« Nous avons été très surpris par les propos du président Ndayishimiye parce qu’il n’a cité aucune source : s’agit- il des recherches qui ont été faites par le bureau du président ? Dieu lui a-t-il parlé ? Ça nous a beaucoup surpris. Mais si le président souhaite que le Burundi devienne le jardin d’Éden, ce n’est pas une mauvaise idée, nous le voulons tous. Mais le jardin d’Éden dont nous avons besoin n’est pas celui que l’on raconte dans les contes, ce n’est pas le jardin d’Éden de l’histoire, nous voulons le jardin d’Éden actuel », a-t-il réagi dans un entretien exclusif avec SOS Médias Burundi.
Et de désirer « la liberté pour tous Burundais, la libération des prisonniers politiques et d’opinion, le rapatriement de tous les réfugiés, le retour à la sécurité au Burundi, le dialogue entre les filles et fils du Burundi, la mise en place des programmes de lutte contre la pauvreté extrême au Burundi ».
« C’est ça la vraie image du jardin d’Éden que nous voulons voir, le président peut continuer ses recherches sur l’histoire mais qu’il nous aide à ce que le Burundi ressemble au jardin d’Éden aujourd’hui, un pays où tous les citoyens vivent en paix et dans la joie », conclut l’activiste aujourd’hui en exil.
Un journaliste senior burundais a estimé que « le président Neva est un idiot, borné et têtu ».
About author
You might also like
Burundi : l’avocat Tony Germain Nkina, « Le prix à payer pour la défense des droits humains au Burundi »( Human Rights Watch)
Dans un entretien publié ce 21 septembre, Human Rights Watch trouve que le travail de défense des droits humains au Burundi est tellement mal apprécié par les autorités que des
LES RÊVES DE BAREGEYA-Tolérance politique : une chimère au Burundi
« Tout change, tout coule, rien ne demeure », mais au Burundi, tout change et seul le bien coule en politique depuis des décennies. Le mal demeure en maître pour
LES RÊVES DE BAREGEYA : quand «l’ennemi de la nation » sauve plus de 300 citoyens des griffes de leurs « protecteurs »
Les cas d’injustice qui se manifestent au Burundi font froid au dos. Il y a lieu de douter du bien fondé de ces écoles de police, ces sections juridiques dans