Justice : le fantôme de Nkurunziza hante ses détracteurs

Justice : le fantôme de Nkurunziza hante ses détracteurs

La cour suprême du Burundi a condamné à la prison à vie 34 individus poursuivis dans l’affaire du coup d’État raté du printemps 2015. Ce sont des femmes et hommes issus des organisations des forces de défense et de sécurité, de la société civile, des médias et des partis politiques. Maître Dieudonné Bashirahishize, un des condamnés parle d’un non événement estimant que la justice burundaise n’est que l’ombre d’elle-même. (SOS Médias Burundi)

Tous les accusés vivent en exil. La décision a été rendue publique le 2 février. Mais à en croire la cour suprême, l’arrêt a été rendu le 23 juin 2020.

Toutefois, une ordonnance du président de la cour suprême que notre rédaction a vue precise qu’elle prononcé du dossier » était programmé dans une audience publique du 30 juin 2020.

Les 34 personnes ont été condamnées à une servitude pénale à perpétuité assortie d’une peine complémentaire d’exercer une fonction publique, activité professionnelle ou sociale pendant 20 ans.

Réaction

Pour Maître Dieudonné Bashirahishize, l’un des concernés, il s’agit d’un non-événement. « Je tiens à préciser que la décision qu’on vient d’apprendre par réseaux sociaux interposés n’émane pas de la justice. C’est une décision politique destinée à saper le travail des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et des opposants politiques. C’est un non-événement. La justice burundaise n’est que l’ombre d’elle-même. Une justice instrumentalisée et qui travaille sous les ordres du parti au pouvoir », a indiqué dans une déclaration écrite à SOS Médias Burundi celui qui a passé ses années à militer au sein des associations de défense des droits des étudiants dans la région des grands lacs d’Afrique quand il était étudiant.

Et d’attaquer les juges « (…), des juges qui attendent les ordres des supers généraux actuellement au pouvoir pour prendre une décision, des juges qui ne peuvent pas prendre une décision en âme et conscience par peur de subir des représailles ne rendent pas justice. Ils rendent publiques les décisions de l’oligarchie qui tient en otage le peuple burundais en général, y compris les juges qui sont devenus de simples fonctionnaires dociles ».

En béret rouge, le général Cyrille Ndayirukiye, numéro deux dans l’affaire du coup d’État raté de mai 2015 avec un de ses gardes du corps non loin de la radio télévision nationale

Selon lui, il s’agit d’une décision auréolée d’un cachet d’une justice apprivoisée, soumise et dépendante. « C’est une décision dans laquelle on criminalise les opinions divergentes, la dénonciation des crimes en cours au Burundi et la défense de l’État de droit », trouve Maître Bashirahishize qui parle de « honte pour les juges et le système judiciaire burundais ».

Privation de droits

L’activiste affirme que « la justice burundaise a refusé aux personnes irrégulièrement citées en justice de se faire représenter par des avocats ». « Lors de l’audience publique, nos sources qui étaient sur les lieux ont fait état d’une accusation qui se faisait par groupe alors que la responsabilité pénale est personnelle. Notons enfin que la cour suprême avait annoncé que le dossier allait être prononcé en date du 30 juin 2020 mais que la même cour revient pour avancer que le jugement avait déjà été rendu le 23 juin 2020″, poursuit-il avant de qualifier la condamnation de « simulacre de procès qui s’est déroulé dans un climat de haine propagée à longueur de journée contre les personnes irrégulièrement citées au point que même le fait d’oser demander l’etat d’avancement du dossier au greffe de la cour pouvait être suivi de menaces et d’intimidations ».

Une décision qui interpelle

La condamnation est communiquée au moment où les autorités burundaises tentent de relancer les relations avec ses partenaires surtout l’UE qui a pris des sanctions consécutives aux graves violations des droits de l’homme dans cet État de l’Afrique de l’est.
« Les partenaires du Burundi ne devraient pas être séduits par des discours vides, mais par des actions concrètes », dit-il.

Celui qui a dernièrement publié un livre intitulé « La nation prise en otage indique que « (…) cette fuite en avant, loin de me décourager me donne plus de force qui me permet de continuer à contribuer modestement dans la restauration d’un État de droit au Burundi ».

Les individus punis par la cour suprême du Burundi devraient aussi verser des frais de dommages et intérêts estimés collectivement à quatre milliards quatre cents quatre-vingt quatorze millions six cents cinq mille francs burundais.

Le montant devrait être partagé par des particuliers, le parti CNDD-FDD et la radio Rema FM (proche du pouvoir).

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Photo : en béret vert, le général Godefroid Niyombare qui avait annoncé un putsch contre feu Pierre Nkurunziza arrive à la RPA ( Radio Publique Africaine) pour lire un communiqué, le 13 mai 2015 à Bujumbura

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