Rwanda-RDC : relations de plus en plus tendues entre les deux pays
Le gouvernement congolais a accusé vendredi soir l’armée rwandaise de soutenir les rebelles du M23, affirmant que les FARDC ont capturé deux militaires rwandais, combattant aux côtés de ce mouvement rebelle. De son côté, l’armée rwandaise confirme des attaques conjointes des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) et des génocidaires FDLR ayant conduit à l’enlèvement de deux de ses éléments. Le conseil des évêques catholiques du Congo s’est dit préoccupé par la situation à l’est du pays. Pour manifester sa colère, Kinshasa a pris une série de mesures dont la suspension immédiate des vols de la compagnie d’aviation RwandAir à destination de la RDC. (SOS Médias Burundi)
Les accusations du gouvernement congolais ont été formulées au terme d’un conseil des ministres tenu dans la capitale congolaise , Kinshasa.
« Les effets militaires retrouvés sur place, les images détenues par nos forces armées ainsi que les témoignages recueillis auprès de nos populations démontrent à suffisance que le M23 est soutenu par l’armée rwandaise », a accusé Patrick Muyaya porte-parole du gouvernement congolais dans un communiqué lu à la télévision nationale de la RDC.
Il parle d’une « attitude récidiviste visant à torpiller nos efforts de pacification engagées dans le cadre du processus de Nairobi ».
Mesures drastiques
Après la réunion, le conseil supérieur de la défense a pris une série de mesures.
« Le M23 est considéré comme un mouvement terroriste. Il sera désormais traité comme tel et de ce fait, il est exclu du processus de Nairobi. Une mise en garde est faite au gouvernement rwandais[..] », a déclaré M. Muyaya.
Et de continuer « Comme mesures conservatoires, il a été décidé la suspension immédiate des vols de la compagnie d’aviation RwandAir à destination de la République Démocratique du Congo. Il a aussi été décidé de la convocation de l’ambassadeur du Rwanda accrédité en République Démocratique du Congo pour lui notifier la désapprobation totale du gouvernement congolais ».
Dans un communiqué, ce samedi l’armée rwandaise a annoncé de son côté que […], « les FARDC avec les génocidaires FDLR ont attaqué le long de notre frontière et deux militaires des forces de défense du Rwanda ont été enlevés au moment où ils étaient en pleine patrouille ». Elle affirme que « les deux militaires sont retenus par les FDLR à l’est de la RDC ».
L’armée rwandaise appelle les autorités congolaises qu’elle accuse de » travailler en étroite collaboration avec les groupes génocidaires », à « relâcher les deux militaires ».
Ce vendredi, la conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) s’est exprimée sur la situation à l’est de la RDC.
« […], le cauchemar de la guerre a trop duré. La Cenco demande aux belligérants de revenir à la raison. Qu’ils mettent fin dans l’immédiat à cet énième combat qui ne fait qu’enfoncer le peuple congolais dans la misère[..] », peut-on lire dans un communiqué signé l’archevêque de Kisangani, président de la Cenco.
Les heurts entre les FARDC et les rebelles du mouvement du 23 mars ont repris le 20 mai dernier sur le territoire de Rutshuru dans la province du Nord-Kivu avant de s’étendre sur plusieurs autres villages du territoire de Nyiragongo. Cette semaine, le commissaire provincial de la Police nationale congolaise dans le Nord-Kivu a appelé la population à « s’armer de machette pour riposter contre les M23 pour sauver la ville de Goma (chef-lieu du Nord-Kivu) en péril ». Des propos désapprouvés par le gouvernement central du Congo.
Peu avant, les autorités rwandaises avaient dénoncé des tirs de roquettes des FARDC sur son territoire, ce que le gouverneur militaire du Nord-Kivu a réfuté.
La situation reste tendue au moment où le fils du président Museveni, le général Muhoozi Kainerugaba, commandant en chef de l’armée de terre en Ouganda a pris Twitter pour s’exprimer sur la situation à l’est de la RDC.
« Ce n’est pas un crime d’être Mututsi ou Muhima ou Muhema ou Munyamulenge! Le M23 demande le dialogue depuis des années. La communauté de l’Afrique de l’est devrait aider à résoudre ce problème », a écrit celui qui considère le leader rwandais Paul Kagame comme son oncle tout en affirmant « être prêt pour attaquer les génocidaires FDLR » et indiquant que ce sera « un désastre » pour tous ceux qui tenteront de s’opposer militairement.
Après leur défaite en 2013, une partie des rebelles du M23 ont fui vers le Rwanda, une autre préférant se rendre en Ouganda. Les autorités congolaises ont toujours accusé le Rwanda de soutenir ce groupe, principalement composé de Tutsis congolais, ce que le Rwanda nie jusqu’à présent.
Récemment, les chefs d’Etat de la communauté de l’Afrique de l’est que le Congo a dernièrement intégré ont initié un dialogue entre le gouvernement congolais et les groupes armés qui pullulent à l’est de la RDC, dont le M23. Avec la décision des autorités congolaises d’écarter le M23 des négociations de Nairobi, la situation risque de se détériorer dans l’est de la RDC, une région en proie à des combats entre l’armée loyaliste et des groupes armés locaux et étrangers depuis plus de deux décennies.
La Cenco a demandé à la communauté internationale, surtout la Monusco (Mission de l’organisation des Nations-Unies en République Démocratique du Congo) d’user de tous les moyens pour que « cette partie du pays recouvre la paix le plus tôt possible ».
Réagissant aux propos du porte-parole du gouvernement congolais, major Willy Ngoma, porte-parole du M23 a indiqué que « rien n’est surprenant que le gouvernement congolais nous ait exclu des négociations de paix de Nairobi ».
« Nous ne tolérerons jamais les attaques conjointes des FARDC en collaboration avec les FDLR et la Monusco », a-t-il dit à SOS Médias Burundi ce samedi en début de soirée.
Et de conclure « Sur l’appellation de groupe terroriste, ils devraient consulter le dictionnaire pour voir la signification du mot ‘terroriste’. Je leur rappellerai également que cela faisait 14 mois que nous sommes en négociation avec le gouvernement à Kinshasa et que nous sommes des militaires congolais disposant de numéro matricule ».
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Photo : des effets militaires rwandais présentés au mécanisme conjoint de vérification de la CIRGL (conférence internationale sur la région des Grands-Lacs) par l’armée congolaise
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