Burundi : le mouvement rebelle Red-Tabara poursuivi pour crime contre l’humanité
Le parquet général de la République du Burundi a annoncé avoir ouvert deux dossiers pénaux pour les attaques de Gatumba (Bujumbura) et Buringa (Bubanza) qui ont emporté près de trente personnes dont des forces de l’ordre. Le mouvement Red-Tabara qui a revendiqué ces attaques dénonce une instrumentalisation de la justice. (SOS Médias Burundi)
La déclaration est du procureur général de la République, jeudi dernier dans la soirée à Bujumbura, la ville commerciale. Pour Léonard Manirakiza, des crimes odieux ont été commis et méritent des répressions exemplaires.
« Au regard de ce bilan macabre, nous nous rendons compte que les terroristes du mouvement Red-Tabara visaient les civils dont des enfants et des femmes et non des militaires. Pire encore pour l’attaque de Buringa, ces criminels terroristes ont surpris un ménage en deuil et ont ainsi endossé la responsabilité de crimes odieux contre l’humanité », a-t-il annoncé.
Pour cet effet, deux dossiers pénaux ont été introduits auprès du parquet général de la République à Bujumbura.
« La justice burundaise est plus que jamais déterminée à poursuivre les auteurs terroristes, les co-auteurs, et les complices jusqu’à leur condamnation à une répression exemplaire », conclut le procureur général.
Les attaques qui font objet d’enquêtes judiciaires selon le parquet de Bujumbura, sont celles de Vugizo à Gatumba ( province de Bujumbura ) et de Buringa à Gihanga (Bubanza) survenues respectivement en décembre et février dernier.
Guerre des chiffres…
Même si le mouvement rebelle Red-Tabara a revendiqué toutes ces attaques, il ne reconnaît pas les chiffres des victimes avancés par le gouvernement burundais.
Patrick Nahimana, porte-parole de ce mouvement, parle de « 16 militaires et policiers tués » dans les deux attaques. C’est au moment où Jérôme Niyonzima, porte-parole du gouvernement burundais, a avancé un chiffre de « 29 personnes tuées dont un militaire et un policier ».
La rébellion s’en défend. « Nous n’avons pas attaqué des civils car ce sont eux que nous protégeons. Au contraire, nous avons attaqué des positions militaires et policières », fait savoir Patrick Nahimana.
« Raison pour laquelle nous rejetons cette enquête car elle est d’emblée biaisée. Nous voulons une commission indépendante consensuelle et nous sommes prêts à contribuer pour que la lumière éclate au grand jour », estime-t-il.

Red-Tabara minimise ces dossiers pénaux.
« Comment faire confiance à une justice qui dépend et reçoit des ordres des généraux, des services de renseignements et du parti au pouvoir ? Ces dossiers judiciaires ne nous engagent pas et ne nous concernent en rien !» insiste le porte-parole de Red-Tabara.
Alors que des acteurs politiques comme Léonce Ngendakumana, partisan des accords d’Arusha, proposent un dialogue entre les belligérants, le président de la République, lui, s’en lave les mains.
« Comment dialoguer avocat ceux qui tuent des enfants, des femmes et des vieillards ? Ils n’ont rien à revendiquer sinon ils orienteraient leurs attaques sur des positions militaires ! Ce ne sont que des terroristes à traîner devant la justice », a laissé entendre le président Evariste Ndayishimiye, lors de sa dernière conférence publique de décembre 2023 à Cankuzo dans l’est du pays.
Mais pour les rebelles, le seul moyen de résoudre le conflit est le dialogue.
« Pour ces qualificatifs de ‘terroristes’ qu’ils nous collent, cela ne nous surprend pas et ne nous empêche pas de continuer notre lutte. Eux, on les appelait des terroristes tribalo-génocidaires dans les années 90, mais cela n’a pas empêché qu’ils s’assoient sur la table des négociations au grand profit de la paix », renchérit M. Nahimana qui affirme que le groupe armé dont il est porte-parole mène des attaques contre le Burundi pour, selon le mouvement, se replier vers les réserves de la RDC au Sud-Kivu, tandis que Gitega se dit convaincu que les rebelles sont abrités et soutenus par le Rwanda.
Failles et soupçons
Le 26 février dernier, au lendemain de l’attaque de Buringa qui a fait 9 morts, selon les autorités burundaises, le premier ministre Gervais Ndirakobuca s’est déplacé dans la région. Il a reconnu « des failles ».
« La sécurité est l’élément moteur de tout. Sans sécurité, l’on ne peut arriver nulle part. Avec l’attaque de Gatumba et cette deuxième attaque de Buringa, cela signifie qu’il y a des failles », a dit M. Ndirakobuca dans son mot luminaire en présence des responsables administratif et sécuritaire, avant de faire sortir les journalistes.

Et de poursuivre : « Le rôle d’assurer la sécurité n’incombe pas seulement aux militaires et policiers ou aux autorités administratives. C’est notre rôle à nous tous, tous les habitants. Personne ne peut être indifférent face à ça. Je sais que nous avons les informations nécessaires sur ces failles ».
Pour le premier ministre Gervais Ndirakobuca, « Nous connaissons ces gens qui perturbent la sécurité, certains sont nos enfants, d’autres nos frères et d’autres nos cousins. Si quelqu’un participe à de tels actes, nous devons le traiter de paria. Nous devons trouver des solutions ensemble pour que cela ne se reproduise plus ».
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Photo : une femme console une voisine qui a perdu un membre de la famille dans l’attaque du 22 décembre 2023 à Gatumba lors de l’enterrement des victimes de cette attaque, le 26 décembre 2023
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