Burundi : la liberté de la presse patine d’après RSF
Le classement annuel mondial fait par Reporters Sans frontières, RSF, montre que le Burundi a reculé de points sur le levier de la liberté de la presse. Cette situation fait suite aux emprisonnements intempestifs de journalistes. (SOS Médias Burundi)
Deux femmes journalistes et un homme sont en prison au Burundi et leur mode d’arrestation à l’allure des disparitions forcées fait peur à leurs collègues. RSF reconnaît seulement les deux femmes jusqu’à présent.
Cette organisation internationale de défense des droits des journalistes classe le Burundi 108ème sur 180 pays avec un score de 51.78. La petite nation de l’Afrique de l’est occupait la 114e place en 2023 avec un score de 52.14.
Pour RSF, malgré quelques signaux favorables envoyés par le président Évariste Ndayishimiye, l’environnement reste encore très hostile pour l’exercice du journalisme au Burundi où deux femmes journalistes sont en prison dont une, Floriane Irangabiye a été condamnée à 10 ans de prison ferme en 2023 pour des accusations d’atteinte à la sûreté intérieure du territoire national, que RSF qualifie de « fallacieuses et infondées».
Autrefois considéré comme l’un des plus dynamiques de la région des Grands Lacs, se souvient RSF, le paysage médiatique burundais s’est considérablement appauvri depuis la tentative manquée de coup d’État de 2015 et la crise qui a suivi et contraint plus de 100 journalistes à l’exil.
« Cette situation pousse des journalistes à travailler dans la peur totale et l’auto-censure extrême du moment que l’organe régulateur ne fait plus son rôle, si ce n’est qu’intimider des professionnels des médias », analyse Sadibou Marong, directeur de RSF, bureau Afrique subsaharienne.
Plusieurs journalistes burundais font le même constat.
« C’est dommage que le 3 mai arrive au moment où le Burundi compte des journalistes en prison. Nous demandons qu’ils soient libérés pour l’honneur du métier », dit un journaliste de la radio locale Isanganiro.
Son confrère lui, ajoute que « si un journaliste est en détention, c’est l’information et la source qui sont retenues et de surcroît le consommateur de l’information qui est aussi emprisonné et privé de l’information ».
A l’approche des élections législatives et présidentielles de 2025 et 2027, les journalistes burundais craignent pour leur sécurité et appellent plus à la liberté de la presse.
« Comme c’est une période extrêmement sensible, nous nous attendons à plus de censure et de blocage de liberté. Nous demandons au CNC* de devancer cette situation et nous rassurer », disent des collègues qui se sont confiés à SOS Médias Burundi.
Le syndicat des journalistes burundais « Burundian Journalist Alliance », fait également un clin d’œil au régulateur.
« Il est temps que le CNC et le ministère en charge des médias se réveillent et défendent des journalistes en danger. Les journalistes sont malmenés et emprisonnés et on entendra jamais la voix du régulateur. L’on dirait qu’ils ne sont là que pour punir », rappelle Melchopr Nicayenzi, président de ce syndicat, BJA.
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RSF quant à elle exige la libération des journalistes détenus.
« Deux journalistes en prison, c’est trop…. Accusations gratuites d’atteinte à la sécurité de l’État comme si les journalistes sont des terroristes. La question de la peur d’arrestations et de représailles contre les journalistes continue à peser lourd. Le pays doit faire beaucoup d’efforts pour encourager l’exercice libre du journalisme », estime Sadibou Marong.
Le rapport de RSF souligne que « si la liberté d’expression est garantie par la Constitution et la loi sur la presse, le cadre légal existant n’offre aucune protection concrète pour favoriser le libre exercice du journalisme ».
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Les autorités burundaises n’ont pas encore réagi face à ce rapport. Mais elles ont qualifié dans le passé, les classements de cette organisation comme « des rapports biaisés s’inspirant de fausses informations fournies par les ennemis du Burundi dans le but de ternir l’image du pays et de ses dirigeants ».
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Photo d’illustration : des journalistes burundais sur terrain dans la capitale politique Gitega, crédit photo : Jean Pierre Aimé Harerimana
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